mardi 28 octobre 2008

Fume et tue (d'Antoine Laurain)


Bonjour Antoine
Bonjour les zotres

Deux événements aussi heureux que concomitants se sont produits début octobre :

- j'ai commencé à trouver sur moult blogs le plus grand bien d'un certain roman que j'ai immédiatement eu envie de lire (non pas parce qu'on en disait du bien mais pour les raisons pour lesquelles on en disait du bien ; il m'arrive parfois d'avoir envie de lire des livres dont on dit du mal),
- j'ai été informée que l'auteur du dit roman serait présent à la session suivante des mille-feuilles organisées par Frédéric Fredj à laquelle j'avais déjà prévu de me rendre (et dont je vous ai parlé ici).

Cela a débouché sur trois zotres événements tout aussi heureux mais successifs cette fois :

- le soir du mille-feuilles venu, ce que j'ai entendu à propos du dit roman et les quelques lignes lues par l'auteur m'ont confirmé qu'il fallait AB-SO-LU-MENT que je le lise,
- quelques jours plus tard, la maison d'édition m'envoyait le précieux volume (de mon côté, je l'avais acheté et fait dédicacé pour une amie),
- hier soir je l'ai refermé à la fois ravie de ma lecture et triste qu'elle soit déjà achevée.

Au cas où certain(e)s ne l'auraient pas encore compris au vu du titre de ce message et de la photo qui l'illustre, je confirme que le livre dont il est ici question s'intitule Fume et tue deuxième ouvrage signé Antoine Laurain.


Le sujet

Fabrice Valantine mène une vie relativement tranquille de chasseur de tête à succès et de fumeur contrarié jusqu'au jour où il devient assassin par accident et le reste pour retrouver le plaisir de la cigarette, malencontreusement disparu suite à une visite chez un hypnotiseur qui l'avait fait disparaître sans effacer pour autant le désir (je dirais plutôt le besoin) de fumer.


Mon avis

Je suis bluffée. Vraiment. Je savais déjà que j'aimerais car tout me l'indiquait :
- un sujet original, gentiment noir et délicieusement amoral,
- un ton décalé, un brin désabusé et plein d'humour,
- une finesse de plume et d'esprit (les deux ne sont pas toujours liées) entrevues lors de la rencontre avec l'auteur et sa lecture du premier chapitre,
- un thème central qui m'intéresse beaucoup à savoir le rapport entre plaisir et dépendance, désir et besoin.

J'ai découvert au fil des pages un style élégant où règne la virgule au service de phrases légères et ciselées souvent plus drôles et profondes qu'il n'y paraît. Antoine Laurain possède au plus haut point l'art des associations d'idées, des enchaînements saugrenus et il joue avec la langue avec une visible (lisible et communicative) délectation.

J'ai admiré la construction habile et très anglo-saxonne du roman consistant à annoncer à l'avance ce qui allait survenir dans les chapitres suivants. Le texte n'est pas rédigé de façon platement linéaire et chronologique mais par une succession d'aller-retour dans le temps au gré des souvenirs de Valantine. Bien plus qu'un simple récit, Fume et tue possède une véritable dimension analytique et ce sont moins les faits que les réflexions de Valantine qui nous sont livrées. Cela ajoute profondeur et épaisseur au personnage et, à mes yeux de lectrice, cela change tout.

J'ai souri des tribulations assassines de Valantine (je sais, c'est très mal), de ses charges contre l'art contemporain (ah tiens, c'est quand la Fiac ?), de ses incompréhensions paternelles, de ses déboires professionnels, etc. Je me suis régalée de voir sa vie merder dans les grandes largeurs.

J'avoue avoir constaté un (tout) petit commencement d'essoufflement pendant quelques pages au milieu du roman, juste avant ce premier meurtre (auteur en panne de clopes ou alors mon côté assoiffée de sang qui avait hâte qu'il coule ?) tellement attendu (oui, très mal décidément) mais le rythme et le plaisir sont ensuite allés crescendo au fur et à mesure que les morts s'empilaient (oui, très mal, vraiment très très mal).


Sur le fond, je maintiens que, contrairement à ce que nous en a dit l'auteur, il ne s'agit pas d'un livre sur le désir et le plaisir mais un livre sur la dépendance et le besoin. Bien sûr, il sait ce qu'il a écrit, mais moi j'ai lu autre chose. Voila.

Comment vous dire ? Je n'ai jamais fumé à part un vague crapautage d'une demie clope par jour pendant mes 2 premiers mois de lycée histoire d'avoir quelque chose à dire à la récréation (du genre "Heu, salut, heu, t'as du feu ?") et je ne comprends pas les addictions de quelque nature qu'elles soient tant j'ai intégré l'idée que "le plus est l'ennemi du bien". Pour moi un comportement addictif est l'exact contraire du plaisir puisqu'il est lié à une dépendance, un besoin et non un désir. Certes, ma vision de la question est bien peu psychanalytique (cf page 162).

Cela dit, sur un plan tout à fait empirique, j'ai été accro à ce livre qui ne m'a pas quittée pendant quelques jours et dont j'ai tourné les pages de manière compulsive jusqu'à la dernière à chacune de mes pauses, chacun de mes trajets en métro. Mais voila, contrairement à une clope qui se remplace par une autre puis la suivante, la sensation immédiate née de la lecture d'une phrase est unique et, lorsqu'elles sont toutes lues, rien ne fera renaître l'intense plaisir de la découverte d'un livre mémorable. Forcément, après, on se sent aussi vide qu'un paquet froissé de Benson dorées.


Quelques liens

Le
blog purement informatif (et donc frustrant) de l'auteur.
Les
premières pages du livre (excellentes) : comment résister à l'envie de lire la suite ?
Vous trouverez d'autres avis positifs chez Caro[line], Fashion, Lou et, à partir de leurs blogs respectifs, d'autres liens vers d'autres blogs parlant (en bien) du livre.


Conclusion

Lisez ce livre, c'est un ordre ! Non mais...

Je vais sans plus tarder ajouter ce roman à ma liste de cadeaux de Noël et je crois que je ne vais pas résister très longtemps à l'envie déjà grande de découvrir ailleurs si j'y suis, le premier roman de l'auteur... Bien sûr, après, il faudra attendre la parution du 3e et ça, ça va être très diffiCécile.

10 commentaires:

Unknown a dit…

salut Cécile, je sais que tu aimes beaucoup Hillerman. je ne sais pas si tu es au courant mais il est mort dimanche dernier. A plus
Anna Blume

Anonyme a dit…

Juste : ça donne envie de le lire, ça donne envie de plus être dépendant, ça donne envie de fumer une clope, ça donne envie d'écrire… Bref, c'est tout en contradictions ! Tant mieux !

Cécile Qd9 a dit…

@ Anna : Merci, je ne savais pas.

@ Ficelle : tant mieux si j'ai pu communiquer une part de mon enthousiasme pour ce livre.

Anonyme a dit…

J'ai lu beaucoup de bien de ce livre, que j'ai noté depuis un moment. Effectivement, le côté humour amoral me tente beaucoup. Pour tes cadeaux de Noël, voici mon adresse : c'est le 45 rue...

Anonyme a dit…

Je crois que j'ai cliqué avant de signer...

Cécile Qd9 a dit…

@ Gael : le 45 ! OK ;o)
Je ferai un loto avec...

Anonyme a dit…

Ah zut! Je pensais pas que tu relèverais mon numéro!!! Bon, en fait, c'est le 82, mais que à partir de la semaine prochaine. ;-)

Anonyme a dit…

Ordre d'ores et déjà exécuté, avec plaisir. J'en parle aussi:

http://fattorius.over-blog.com/article-24549039.html

Et il faudra que je prenne le temps d'explorer votre blog!

Restling a dit…

Je m'interroge : est-ce vraiment le livre à lire quand on vient d'arrêter de fumer et qu'on le vit plutôt mal ? ^_^
Mais par contre, comme tu vantes sa plume, je vais lire son prochain. :D

doriane a dit…

Billet très intéressant, j'ai moi aussi beaucoup apprécié et vais me précipiter sur son "carrefour des nostalgies"