samedi 26 février 2011

Comme un boomerang (Serge Gainsbourg)

Hommage à Serge
Bonjour aux zotres

Serge Gainsbourg est décédé il y a 20 ans déjà. Mélodiste hors pairs, poète sachant jouer avec les subtilités de notre langue et manier finement les alitérations et les assonances, ses chansons nous reviennent heureusement heureusement aux oreilles et au coeur comme des boomerangs de talent.

vendredi 25 février 2011

Grâce et dénuement (de Alice Ferney)

Bonjour aux gitans
Bonjour aux gadjé(e)s
Bonjour aux zotres

Certains titres donnent une idée assez précise du thème du livre : la moustache, Passion simple ou Le crime de l'Orient express sont de ceux-là. D'autres sont plus énigmatiques et ne s'expliquent qu'au détour d'un paragraphe tels que Le Chameau sauvage ou L'adversaire.

Grâce et dénuement entre dans une troisième catégorie et ce titre si beau et poétique donne un aperçu assez juste de la qualité du texte et de l'ineffable sensibilité d'Alice Ferney.

Le sujet

Dans un terrain vague déserté de tous, une famille de gitans s'est sédentarisée, vivant en marge de la société et de ses règles. La mère Angéline règne sur le clan constitué de ses 5 fils, de ses 4 brus et de leurs enfants. Tous illustrés, ils tolèrent plus qu'ils n'acceptent les premières visites qu'Esther rend hebdomadairement aux enfants pour leur faire la lecture. Peu à peu, quelques liens se nouent entre elles et les femmes.

Mon avis

Un(e) lectrice passionnée ne peut être qu'intéressée par un livre consacré à la magie de la lecture et, de fait, j'avais quasiment les larmes aux yeux en découvrant le passage où Esther, lors de sa première visite, entame la lecture d'un Babar.

Ce livre aurait pu être un coup de coeur. Il s'en est fallu de peu. L'écriture de Ferney est superbe, sensible, intelligente, possédant ce sens du détail qui permet de saisir une situation dans son ensemble, qui en disant peu donne à comprendre beaucoup sans le moindre effet démonstratif. L'auteure aime visiblement ses personnages et les respecte. Aucune situation n'est caricaturale ou mièvre. La vie du camp est décrite de manière passionnante, les personnages féminins sont extraordinaires. Les chapitres se succèdent sans que l'attention ou l'intérêt ne retombent jamais. Le roman était donc paré de toutes les séductions mais j'aurais préféré qu'il cherche à me convaincre aussi parfois.

Si je suis vraiment conquise et ressors de ma lecture totalement charmée, il n'en reste pas moins vrai que lorsque je réfléchis en faisant abstraction de mes émotions, je trouve deux gros défauts au roman qui font que si Grâce et dénuement est incontestablement un très beau livre et un excellent moment de lecture, ce n'est pas un grand livre, de ceux qui en plus de nous plaire, de nous bouleverser ou de nous enthousiasmer nous changent en profondeur, nous marquent, nous donnent à réfléchir, nous habitent.

En premier lieu je reproche au roman un certain angélisme voire un manichéisme certain. C'est évidemment le droit le plus strict de l'auteure de prendre partie, d'adopter le point de vue des gitans mais alors qu'elle le fasse clairement, qu'elle assume totalement cette position. En fait, sous couvert d'une neutralité de façade sensée montrer les deux faces d'une même médaille, Ferney se montre souvent complaisante face aux manifestations de mépris des gitans envers les gadjés (mot signifiant à la fois "non gitan" et "putain" : tout est dit !) là où elle insiste volontiers sur celles des gadjés envers les gitans. Si la mysogynie des gitans est montrée de façon factuelle tout au long du livre, elle n'est jamais analysée, jamais remise en cause dans le livre, jamais soulevée. Il en va de même pour des sujets tels que la saleté, le vol, le travail. Si le roman livre de vagues éléments d'argumentation, c'est toujours une justification à sens unique qui ne trouve pas de contradiction dans les pages de Ferney... Par exemple, à un gitan qui explique qu'il ne travaille pas parce que les seuls travails auxquels il pourrait prétendre le déshonnoreraient Esther (ou l'auteure !) ne répond pas que, pourtant, ces travails, il y a des hommes et des femmes qui les accomplissent et qu'ils n'en sont pas moins respectables au contraire. Esther du début à la fin se contente des rôles de lectrices et de spectatrice et à aucun moment ne s'instaure un véritable dialogue, des tentatives d'explications, de débats, de meilleure compréhension.

Et j'en arrive naturellement au second bémol que j'adresse au roman. Esther lit des livres aux enfants et se battra pour leur permettre d'accéder à la scolarisation. Mais ça s'assête là. Pendant des mois et des mois, chaque mercredi, elle vient passer quelques heures à lire des livres. Un jour elle propose de faire une lessive chez elle, un autre elle emmêne une femme remplir un bidon d'eau mais son implication se limite à ça. Elle a peur que les enfants aient froid en les voyant débraillés pendant l'hiver et elle leur suggère d'aller chercher un pull et ils répondent qu'ils n'en possèdent pas. Comment une femme qui tisse soit disant des liens avec ces gens depuis des mois n'aurait pas eu l'idée de leur de vieux vêtements de ses propres fils ? Comment en tant que mère n'aurait-elle pas dépensé 50 euros dans une solderie pour quelques polaires ? Le seul cadeau qu'elle fait un jour à ces enfants qui ne savent pas jouer est un jeu de cartes.

Esther lit, Esther répond aux questions, Esther constate mais Esther reste constamment en retrait, Esther ne questionne pas, Esther ne remet pas en cause, Esther ne stimule pas l'imagination, le désir, les confidences. Esther ne cherche pas à donner aux enfants l'envie d'apprendre à lire. Esther se cantonne dans un rôle passif, un rôle de témoin toléré et les échanges restent finalement très superficiels, peu impliquants.

En définitive, je ne la comprends pas ou ce que je comprends d'elle me la rend étrangère. Je ne peux pas croire que l'initiative initiale d'Esther n'ait pas eu plus d'impact sur elle et engendré des conséquences imprévues, une implication supplémentaire, croissante au fil du temps et, à tort ou à raison, le sentiment d'une responsabilité envers ces enfants. L'engagement et l'attachement ne peuvent pas se limiter à un horaire établi aussi immuable que des séances chez un psy parce que l'humanité et les affects ne se programment pas ainsi.

Quelques liens

Calou donne un avis très sensible et positif où les mots "par réaction" résument fort bien le reproche que je fais au roman
Mondalire propose un résumé du livre, un extrait assez représentatif et quelques critiques issues de la presse
Le journal d'une lectrice évoque à quel point le dénuement est décrit avec grâce... C'est vrai.

Conclusion

Un très très très beau roman, vraiment, dont l'empreinte cependant s'efface avec grâce...

jeudi 24 février 2011

Dîner livres échanges (de mars 2011)

Bonjour aux habitué(e)s
Bonjour aux zotres

Le prochain DLE aura lieu le jeudi 3 mars au restaurant L'ADRESSE situé 42 rue Rochechouard dans le 9e. Rdv sur place à 20h00.
J'ai pu acquérir sur Lookingo des bons de réduction permettant de diminuer sensiblement l'addition dont je ferai profiter les personnes présentes. Infos sur le resto via le site
La fourchette

Plus d'infos sur le concept et liste des personnes inscrites sur le
blog consacré aux DLE.

mercredi 23 février 2011

Coup de pompe (de février 2011)

Bonjour aux provocatrices de la tête aux pieds
Bonjour à celles qui assument leur mauvais goût
Bonjour aux zotres

Quand j'ai vu cette chaussure signée Massimo Dogana j'ai juste pensé "vulgaire" et "gonflé" et "amusant 2 secondes"... Mais quand j'ai vu le prix
ici j'ai franchement éclaté de rire... et je me suis dit que c'était une provocation de plus de la part du créateur...

mardi 22 février 2011

Sexfriends (comédie romantique US)

Bonjour aux ami(e)s
Bonjour aux amant(e)s
Bonjour aux zotres

Les comédies romantiques US ne sont pas des films que je vais voir spontanément au cinéma. J'ai vu celle-ci en projection presse. Je suis entrée dans la salle avec une tonne de préjugés et, après l'avoir vu, je confirme que si vous n'allez au cinéma qu'une fois tous les 36 du mois, Sexfriends n'est pas une priorité absolue et je vous conseillerais plutôt Le discours d'un roi par exemple...

Cela étant posé, si vous allez au cinéma souvent, la donne est différente. Je me suis surprise moi-même à bien aimer ce film, à sourire du début à la fin et à marcher (non, pas uniquement pour le bel Ashton Kutcher qui devrait faire un petit régime !) au point qu'à la sortie j'ai ressenti le besoin de demander à d'autres personnes présentes si elles avaient aimé ou non. Dans l'ensemble, pas du tout (pour des raisons qui m'ont fait un peu halluciner tout de même vu que nous savions que nous n'étions pas face à un film Art et essai) mais cela ne change rien au fait que moi,
ben oui, j'ai aimé...

Le sujet

Emma et Adam se connaissent vaguement et se sont croisés brièvement à diverses reprises au cours de leur adolescence. Quand ils retombent l'un sur l'autre au propre comme au figuré, Adam vient de recevoir un choc plutôt humiliant et Emma est une interne en médecine surbookée et littéralement paniquée à l'idée de s'engager. Ces deux là étaient donc fait pour coucher ensemble et rien de plus même si affinités.

Mon avis

L'affiche prévient "Entre "Sex Friends", il faut respecter quelques règles de base : Ne jamais s’offrir de cadeaux. Ne pas dîner en tête à tête. Accepter la concurrence. Oublier le mot "chéri(e)". Toujours partir avant le petit-déjeuner. Et surtout, ne jamais tomber amoureux ! Est-ce bien clair pour Emma et Adam ?

Il est clair que sans le dernier avertissement, il n'y aurait pas de film car ce n'est évidemment pas déflorer le sujet ou bousiller un suspens haletant que de dire qu'évidemment l'amour va compliquer la donne si parfaitement simple en théorie... Quant aux 5 autres règles, je ne suis d'accord qu'avec la 3e : la sexfrienditude fonctionne s'il n'y a pas exclusivité, je dirais même que ça ne fonctionne QUE sous cette condition. En fait, il y en a 2 autres que ne suggère pas le nom que les anglo-saxons ont donné au concept :
- la première est de ne surtout pas choisir un/des ami(s) comme sex friends car on est nettement plus sûr(e) de gâcher une amitié que de trouver un(e) bon(ne) amant(e) !
- la seconde est de ne pas imaginer que ça peut durer éternellement (même si ça peut tenir un moment). Mais qu'est-ce qui dure en ce bas monde de nos jours, hein ?

Pour le reste, les règles mentionnées sur l'affiche sont bidons : s'il suffisait d'offrir des cadeaux ou de dîner avec quelqu'un(e) pour tomber amoureux/se ça se saurait. Elles sont même contreproductives dans la mesure ou la sexfrienditude a besoin d'un minimum d'entretien autre que physique, de plus de quelques heures sous une couette. Elle se nourrit de complicité, de partage. C'est finalement quelque chose de très affectif.

En fait, je connais bien le sujet. La pratique du "sexfriendship" fut pendant quelques années une sorte d'art de vivre des plus agréables, à la fois hédoniste et pragmatique, empreint de légèreté (équilibrante), de plaisirs divers, de (bonnes) surprises variées, de découvertes sensuelles et, accessoirement, de (beaux) souvenirs pour mes vieux jours (mais pas forcément à raconter à mes petits enfants !!!).

C'est sans doute pour ça que le sujet du film m'intéressait à la base : je voulais voir comment il était traité, je voulais non pas m'identifier à Natalie Portman (la pauvre ne m'arrive évidemment pas à la cheville) mais reconnaître certains traits de caractère, sourire à certaines situations vaguement vécues.

Hélas, aucun homme ne m'a jamais offert un bouquet de carottes. mais est-il trop tard ?

Le film ne va pas si loin et n'a pas spécialement vocation à dresser une analyse sociologique du phénomène mais bel et bien à dérouler la mécanique de toute comédie romantique US qui se respecte : 2 êtres qui se désirent, s'attirent puis s'aiment et vont forcément finir ensemble alors qu'on croyait (mon oeil) que tout était perdu... Tous les ingrédiens sont là : les amis un peu lourds qui donnent de mauvais conseils, la soeur épanouie qui donne de bons conseils, le rival cynique, l'autre fille éperduement amoureuse, la musique sirupeuse, la rupture fatale, les quiproquos, la jalousie et... ZE happy end ! Ahhh !

Il n'en reste pas moins que si j'ai détesté certaines scènes louchant vers le graveleux et qui m'ont rapellé certains dialogues de la série Californication (où faute de scénario on fait du Jean-Marie Bigard lourdingue), j'ai bien aimé ce film pour les raisons évoquées plus haut, mais aussi, je crois parce que s'il respecte les codes du genre, il en casse au moins 2 :
- à la base les héros ne cherchent pas l'amour, ils cherchent même à l'écarter de leurs pensées voire à le fuir,
- c'est bien Emma et non Adam qui dirige la relation et en impose les règles. C'est elle le moteur de l'histoire et le leader de l'action. Girl Power ! Yeahhh !

Côté casting, le couple fonctionne. Ashton Kutcher est sympa, délicieusement souriant et mal coiffé et Natalie Portman donne beaucoup de peps à son personnage.

Quelques liens

Allociné pour plus d'infos
Une interview du sociologue Jean Paul Kauffman sur le concept

Conclusion

J'ai passé un très bon moment de détente souriante. Une comédie romantique plutôt dans la moyenne haute du genre et abordée sous un angle moins romantico-édulcoré que d'habitude.

lundi 21 février 2011

Les finalistes français (du prix Quoide9 2010)

Bonjour à Philippe, Emmanuel, Jean-Paul et Fabrice
Bonjour aux zotres

Les 3 finalistes du prix Qd9 2010 ont un point commun avec les 3 mousquetaires : ils sont 4 !

Les zheureux zélus sont :
6 voix - Une vie Française - Jean-Paul Dubois
3 voix - L'origine de la violence - Fabrice Humbert
3 voix - D'autres vies que la mienne - Emmanuel Carrère
3 voix - Plage de Manacora, 16h30 - Philippe Jaenada

Le fait que 13 romans soient en lice a entraîné une grande dispersion des votes... Seul le roman de Dubois a reçu un nombre massif de voix (6 sur 9) et les 3 zotres ont reçus 3 voix chacun.

J'aurais pu, comme l'an passé, décider de refaire un tour de scrutin pour désigner 2 romans parmi les 3 ex-aequo mais je ne l'ai pas fait pour plusieurs raisons :
- d'abord parce que Jaenada avait 2 romans en lice ce qui est pour le moins un signe d'enthousiasme populaire et j'aurais trouvé injuste qu'il risque l'élimination malgré tout (on notera que, comme je m'y attendais, aucun jury n'a voté pour les 2 livres de l'auteur,
- ensuite, je l'avoue j'ai été tenté de modifier mon vote initial en faveur de Une vie française qui n'en avait pas besoin et de le reporter sur Plage de Manacora 16h30 ce qui aurait d'emblée qualifié Jaenada comme finaliste mais Humbert et Carrère seraient restés ex-aequo et la question d'un 2e tour serait restée entière et tout aussi injuste,
- aussi parce que ça aurait encore nécessité un mailing à mon jury chéri puis des relances pour les moins disciplinés, des calculs, des tableaux, des trucs et des machins fatigants,
- enfin parce que c'est après tout "mon" prix, que chacun(e) sait que j'ai des velléités dictatoriales voire des prédispositions mais trop peu d'occasions de les montrer...

Détail des votes

Alix
Jaenada - Plage de Manacora
Humbert - L’origine de la violence
Gaudé - La porte des enfers

Anne-Sophie
L’origine de la violence - Fabrice Humbert
Une vie française - Jean-Paul Dubois
D'autres vies que la mienne - Emmanuel Carrère

Cynthia
Jaenada - Plage de Manacora
Benacquista - Quelqu'un d'autre
3) Beigbeder

Sophie
Carrère - D'autres vies que la mienne
Lesbre - Sur le sable
Dubois - Une vie française

Cécile
Emmanuel Carrère d'autres vies que la mienne
Jean-Paul Dubois - Une vie française
Philippe Jaenada - Le chameau sauvage

Olivier
Jean-Paul Dubois - Une vie française
Jaenada - Plage de Manacora
Fabrice Humbert - L’origine de la violence

Christophe
Une vie française - Dubois
Sur le sable - Lesbre
Le chameau sauvage - Jaenada

Thierry
Un roman français - Frédéric Beigbeder
Quelqu'un d'autre - Tonino Benacquista
Une vie française - Jean-Paul Dubois - Christophe

Daniel
François Martini, Le Temps
Michka Assayas, Solo
Marguerite Duras, La Maladie de la mort

samedi 19 février 2011

A vos recettes (avec Gilles Grasteau)

Bonjour Gilles
Bon appétît les zotres


Gilles Grasteau est le chef du restaurant le Fist de l'hôtel Westin à Paris. Il a travaillé chez Dalloyau et pour une kyrielle de grands restaurants parisiens... mais quand il avait 16 ans, il était apprenti chez mes parents.

jeudi 17 février 2011

Les anges cannibales (de Jean-Claude Derey)

Bonjour aux enfants soldats
Bonjour aux anges
Bon appétît aux cannibales
Bonjour aux zotres

En 2009, j'ai dévoré Johnny Chien méchant d'Emmanuel Dongola et j'ai adoré ce livre au point de l'intégrer à ma sélection pour le prix Qd9 2010. mon choix a apparemment plus aux zotres juré(e)s puisque ce roman figure parmi les 3 finalistes.

Début 2010, une péripétie blogosphérique déjà maintes fois évoquée ici et ailleurs, m'a fait découvrir le formidable Papoua de Jean-Claude Derey que Cynthia m'a offert.

Cette rencontre littéraire m'a donné envie de contacter l'auteur et, suite à nos échanges, ce dernier m'a fait parvenir deux de ses romans dont un exemplaire du sublime Les anges cannibales dont le thème est similaire à celui du roman de Dongola. J'ai adoré ce livre et je peux d'ores et déjà vous annoncer qu'il fera partie de ma sélection pour le prix Qd9 2011.

Le sujet

Yondo avait tout pour être un petit garçon ordinaire voire heureux si ce n'est l'endroit et le moment où il est né : en Sierra Leone en pleine guerre civile. Un soir, ses parents sont sommairement exécutés devant ses yeux. Son petit frère et sa grande soeur enlevés. Il se retrouve seul et va se débattre pour survivre malgré tout et son implaccable descente aux enfers le conduira à devenir un enfant soldat avec tout ce que ce statut implique de violence, de drogue, de meurtres, de viols, de sauvagerie, de stupidité, de désespoir et... de précarité.

Mon avis

Quel choc que ce livre !
Forcément, la comparaison avec Johnny Chien Méchant s'est d'emblée imposée à moi et j'ai retrouvé moult informations concordantes, anecdotiques ou terribles, sur les conditions de recrutement des enfants soldats, les mains coupées, les viols, la drogue omniprésente, la magie, les surnoms, l'aide internationale, les bribes d'enfance survivantes malgré tout, etc.

J'étais donc, si j'ose dire, en pays (inhospitalier) de connaissance, en terrain (miné) familier mais à aucun moment je n'ai trouvé ce 2e voyage (au bout de l'enfer) redondant, répétitif. J'y ai même, c'est certain, éprouvé plus de plaisir sur le fond et sur la forme.

Sur le fond
Jean-Claude Derey a l'air et la manière de construire ses récits et de creuser ses sujets. Le roman adopte le point de vue de Youndo que l'on suit pas à pas sur le chemin de son calvaire enfantin. Il est en quelque sorte le Candide projeté dans l'univers cauchemardesque de la guerre, à la fois témoin et acteur, survivant tantôt par la seule force de sa volonté, tantôt par pur hasard, simple concours de circonstances.

Sur la forme
L'écriture de Derey est magnifique, forte, engagée. Parce que l'auteur mord dans les mots sans complaisance, parce qu'il y a dans sa plume autant de noirceur que de trucculence, de poésie que de froideur analytique, parce que sa palette est riche et équilibrée et que la beauté de sa langue donne plus de force encore à la gravité du propos.

Le titre
Le titre, Les anges cannibales, résume ce que je viens d'écrire. C'est un très bel oxymore, plutôt poétique qui résume formidablement le contenu du livre et une des problématiques qu'il aborde : Peut-on à la fois être victime et bourreau ? Quand cesse-t-on d'être l'une pour n'être plus que l'autre ? L'innoncence de l'enfance n'est-elle pas le meilleur terreau de la violence extrême ?

D'autres avis

J'ai prêté ce roman 2 fois. Anne-Sophie l'a beaucoup aimé aussi je pense mais elle n'a pas de blog pour le dire ce qui n'est pas le cas de Mister Gangoueus dont j'étais certaine que le sujet l'intéresserait et qui, lui aussi, a été sensible à la très belle écriture de Derey.

Conclusion

Sans la moindre hésitation un de mes 3 roman français préférés en 2010. Un grand merci à Jean-Claude Derey de s'intéresser autant à l'Afrique, de me donner envie de mieux la comprendre (dans les limites où j'en suis capable) et surtout, d'écrire si bien !

mercredi 16 février 2011

Exponaute (et Tony Cragg au Louvre)

Bonjour aux expovores
Bonjour aux expophages
Bonjour aux zotres

Une personne travaillant pour le site m'a envoyé un mail m'annonçant la création du site Exponaute. Je trouve le concept excellent et je relaie donc l'info avec grand plaisir. le site manque cependant encore un peu d'ergonomie et de contenu car la recherche que j'y ai effectuée n'a pas abouti.

Cela me donne en outre l'occasion de vous raconter une anecdote artistique sans intérêt sinon pour moi et qui prouve que j'ai des plaisirs simples (parfois).

Lors de la Fiac 2006, j'avais découvert de curieuses sculptures sous la verrière du Grand Palais. Elles m'avaient plu au delà des mots pour leur poésie et leur caractère indéniablement photogénique. A l'époque, je ne possédais pas encore de numérique m'a j'avais déjà la photo facile et je dégainais mon portable sans hésitation ni retenue.

Hélas, ma batterie était à plat et je n'ai pu prendre que 3 clichés de ces oeuvres. J'aurais pourtant aimé les prendre sous tous les angles et les courbes, en appréhender tous les reliefs, en admirer la sensualité ludique, jouer avec eux, en saisir les détails.

Comble de malchance, j'ai assez vite perdu le flyer présentant l'oeuvre de cet artiste que je ne connaissais pas et faute d'avoir noté son nom, il me fut impossible de faire la moindre recherche sur le net pour en savoir plus sur ce que j'avais vu et aimé. Peu de temps après, j'ai choisi la photo ci-dessous comme identité visuelle du groupe Yahoo Quoide9 (l'ancêtre de ce blog). Elle l'est restée depuis.

Avant hier dans le métro, je suis tombée en arrêt devant une affiche dans le métro, devant un mouvement rouge sur fond blanc, une sculpture élancée et immédiatemen identifiable. Son auteur s'appelle Tony Cragg dont quelques oeuvres sont actuellement présentes au Louvre parallèlement à l'exposition . C'est bête à dire, mais il est vrai que je suis restée en arrêt devant l'affiche, le regard fasciné et le sourire aux lèvres et le regard. Je crois bien que, plus que du plaisir, ce que j'ai ressenti alors peut s'apparenter à un petit moment de bonheur.

Bien sûr, j'irai au Louvre. Accessoirement, j'irai aussi au Musée Rodin voir l'expo Henry Moore dont la superbe sculpture de tête devant l'église Saint Eustache est associée à une autre anecdote qui, elle, n'est absolument pas racontable ici (et qui, elle, concerne plus le plaisir que le bonheur).

mardi 15 février 2011

L'adversaire (d'Emmanuel Carrère)

Bonjour à celles et ceux que les faits divers fascinent
Bonjour à celles et ceux qu'ils inquiètent
Bonjour aux zotres

Avant d'amorcer la rédaction de ce message, je savais que le préambule serait long et détaillé. J'en avais déjà la trame chronologique dans la tête mais je n'imaginais pas une seule seconde que je me heurterais à une complication avant même de le rédiger.

Le contexte

Pour la première fois depuis que j'ai créé ce blog, il m'a été difficile de formuler mon traditionnel bonjour introductif. Parfois je manque d'inspiration mais jamais jusqu'ici je n'avais éprouvé de gêne pour écrire le premier truc (inspiré ou non) qui me passait par la tête. Cette fois j'ai biaisé et je n'ai écrit que le second truc qui m'est passé par la tête. C'est dire si trouve délicat d'évoquer ce livre.

En fait, je ne voulais pas le lire. Lors de sa sortie, je me souviens de la polémique autour de la démarche d'Emmanuel Carrère et de l'intérêt de raconter cette histoire à la fois fascinante et sordide, dramatique et incroyable. N'étant fan ni des scandales ni des faits divers, j'en avais vite conclu que ce bouquin n'était pas pour moi et, après avoir lu et adoré D'autres vies que la mienne, après avoir lu et diversement apprécié La Moustache, je m'en tenais à ma première position. Oui, je lirais d'autres Carrère mais pas celui-là. Et pourtant, je l'ai chez moi depuis des mois, en évidence sur une étagère juste à côté de La classe de neige (que j'attendrai avant de lire).

Lorsque j'ai eu une discussion avec une collègue à propos de cet auteur et qu'elle m'a dit qu'elle n'avait rien lu de lui mais était très tenté de découvrir L'adversaire, j'ai proposé de lui prêter. Miraculeusement, j'y ai pensé (non sans fierté !) un matin de la semaine dernière et je l'ai fourré dans mon sac pour lui apporter.

Acte manqué ou pas, allez savoir, toujours est-il que ce même matin, j'ai étrangement oublié chez moi Grâce et dénuement le superbe roman d'Alice Ferney et je me suis donc retrouvée dans le bus sans rien à lire sinon mon agenda, quelques texto (et, précision pour Liliba, quelques sexto aussi) et... L'adversaire. Je l'ai donc ouvert et je ne l'ai plus lâché.

Le sujet

Le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand assassine sa femme, ses deux enfants, ses parents avant de prendre des cachets et de mettre le feu à sa maison. Il vivra.
Pendant 18 ans, cet homme secret, un peu transparent, avait réussi à faire croire à tout son entourage qu'il possédait un diplôme de médecine et était chercheur à l'OMS en Suisse. En fait, il n'était rien de tout ça, passait ses journées dans sa voiture et vivait en escroquant les membres de sa famille à qui il avait laissé miroiter des placements mirobolants.

Mon avis

Mon refus de lire ce livre tient moins à l'aspect éminemment glauque du fait divers qu'à la double gêne et aux questions que provoquaient en moi, l'idée même d'en faire le récit d'une part et de le lire d'autre part.

Sans vouloir rentrer dans une auto-analyse de bazar et hautement impudique, je pense qu'il y a du Romand en moi (comme en chacun(e) cela dit) et si la plupart des aspects de sa personnalité en font à mes yeux un être abject, méprisable, en tous points inexcusable, révoltant (etc.), incommensurablement lâche (mot qui apparaît pour la première fois dans les toutes dernières pages du livre). Il n'en reste pas moins qu'il y a une part de lui que je comprends. Si je sais (heureusement !) que ma personnalités est par bien des aspects aux antipodes de ce qui a poussé Romand à tuer les siens, je comprends en revanche fort bien certains traits de son caractère qui ont conduit au drame ou tout au moins ont rendu les circonstances qui ont conduit au drame possibles.

Il y a un mot que je n'ai jamais trouvé dans les quelques 200 pages de Carrère, c'est l'adjectif velléitaire. Il me semble pourtant évident, dès les premières pages du roman que c'est en raison d'un cocktail explosif de peur (panique) de décevoir, de refus du conflit (de terreur face au conflit ?), de tendance dépressive et de velléitarisme profond (voire d'aboulie) que Romand a mis le doigt dans l'engrenage sans jamais avoir assez de volonté et d'énergie pour l'en retirer.

C'est à mes yeux un phénomène passionnant voire fascinant et le facteur déclenchant, le point de départ de tous les mensonges ultérieurs et le fait que Romand ait préféré s'y engluer plutôt que de s'en extirper est un aspect du récit nettement plus intéressant que sa fatale conclusion. En l'occurence, il s'agit d'un "non acte". Comment appeler ça autrement ? même pas une décision de ne pas faire, juste le fait de laisser filer le temps, d'attendre qu'il soit trop tard pour faire en étant incapable de décider autre chose, une sorte de tétanie mentale, l'amorçage d'une bombe à retardement induisant un suicide très lent et passif... Pendant le procès, l'accusé a tenté de justifier et de rationnaliser ce point de départ par une nouvelle avalanche de mensonges aussi absurdes qu'insultants pour ses victimes. Pourquoi n'a-t-il pas voulu dire qu'à un moment (plusieurs en fait), il a été comme un lapin devant les phares d'une voiture : incapable de bouger.

Cette dimension psychologique et analytique des causes m'a fascinée et le fait de savoir avant même de lire le livre qu'elle me fascinerait est une des raisons pour lesquelles je ne voulais pas l'ouvrir. La personnalité de Romand en revanche est loin de me fasciner. Je crois que le sentiment qui a dominé pendant toute ma lecture est le mépris le plus total, sans la moindre once de début de commencement de compassion, un jugement définitif fondé sur la profonde conviction de l'absolue lâcheté et fausseté de l'homme. Sur celle tout aussi évidente à mes yeux qu'il n'a jamais voulu se suicider quoiqu'il en dise (et peut-être quoiqu'il en pense lui-même), qu'il n'éprouve pas le repentir et la foi qu'il prétend ressentir, que tous ces actes et paroles sont calculés, déplacés, indécents.

Si Emmanuel Carrère, parfois, peut suggérer ou évoquer certains de ces points même autant d'interrogations, de mystères, il évoque aussi leur contraire, la possibilité d'une forme de sincérité, de repentir, de douleur éprouvé pour ce qu'il a fait plus que pour ce qui lui est arrivé...

Et j'en arrive (enfin !) au 2e aspect de la double gêne que j'évoquais plus haut : je ne perçois toujours pas le point de vue de l'auteur. Son avis oui, plus ou moins (même si ce n'est pas l'objet du livre...) mais le point de vue qu'il a souhaité adopter dans son livre, non. Et c'est là un énorme paradoxe voire un tour de force de l'auteur car, si c'est un aspect qui m'a vraiment posé un problème d'un point de vue intellectuel et même moral dans le cas précis (là encore avant même d'ouvrir le livre), d'un autre côté, je crois qu'il était quasi impossible de faire autrement, de raconter autrement cette histoire.

L'auteur lui-même c'est heurté pendant plusieurs années à cet écueil au point d'avoir interrompu la rédaction de son livre avant de le reprendre. Il utilise en permanence un procédé assez similaire à celui repris ensuite dans D'autres vies que la mienne : faute de point de vue, il contextualise son récit, il ponctue la narration en la jalonnant de références à sa propre existence, à ses propres actes ou pensées. En écrivant ce qui précède, je m'aperçois que je n'ai pas fait autre chose en rédigeant cette critique.

Quant à l'inévitable "comment est-ce possible ?", oui, forcément, tout le monde s'est posé la question et là, autre malaise... Qui a pensé que j'évoquais la série de meurtres et non les 18 années de mensonge total ? Au final, c'est sûrement ça le plus stupéfiant dans cette histoire car pour aboutir à un carnage, la folie d'un homme suffit. Pour mentir sa vie à ce point, il faut en revanche la crédulité, la passivité de tout un entourage familial qui n'a jamais appelé au bureau, n'a jamais mis le nez dans un relevé de compte, n'a jamais posé une question ou jamais écouté une réponse ? Cette dimension de l'existence de Romand oscille entre comique et pathétique et finalement c'est moins les mensonges eux-même qui laissent incrédules que le fait qu'autant de gens les aient gobés pendant si longtemps. Et là encore l'auteur fait l'impasse sur un mot : "communication" pourtant essentiel à l'analyse qu'il fait cette réalité aux conséquences dramatiques. De quoi parlait ce couple ? Quelles oeillères avaient ses parents ? Quel aveuglement collectif à mené 5 personnes à la mort.

La fascination étonnée que l'on peut éprouver pour certains aspects de l'affaire Romand est de même nature que celle que l'on ressent en songeant aux époux Courgeau et là encore, la stupeur réside moins dans le comportement hallucinant d'une mère que dans le fait qu'un mari, une famille, des amis ne voient rien.

Au final, je ne peux adresser qu'un reproche à l'auteur, reproche qu'il s'est d'ailleurs adressé à lui-même (pour empêcher, éventuellement d'autres de le faire ensuite ? ça ne marche pas, la preuve...). Volontairement ou non, Emmanuel Carrère fait de Romand le héros qu'il a toujours fantasmé d'être. L'histoire que l'auteur raconte devient "son" histoire et pas celle de ses victimes reléguées au rôle de personnages secondaires et n'ayant, par définition, pas la parole. Alors pourquoi la donner au meurtrier ? Pourquoi publier ses lettres ? Pourquoi le mettre en lumière et ne pas recueillir les témoignages des parents, des frères et soeurs des victimes comme il a complaisamment recueilli le sien ? Comme il l'a rencontré en prison (une seule fois certes).

Peut-être a-t-il esssayé ? Peut-être n'ont-ils pas souhaiter le rencontrer ? Mais alors il aurait fallu le dire, leur accorder ce droit au silence plutôt que leur imposer.

Conclusion

Un livre dérangeant certes mais aussi bluffant, intelligent, brillant, parfaitement maîtrisé (mais parfois un peu moins de maîtrise est plus humain). Un livre sur le fil du rasoir dont l'auteur se sort formidablement bien. Mais je ne peux que répéter mes deux questions :
Pourquoi l'a-t-il écrit et pourquoi le lit-on ?

Adaptation cinématographique de Nicole Garcia avec Daniel Auteuil et Géraldine Pailhas. Pas vu. Pas du tout envie.

samedi 12 février 2011

Sexfriend (avec Natalie Portman et Ashton Kutcher)

Bonjour à celles et ceux qui envoient des sexto
Bonjour à celles et ceux qui en reçoivent
Bonjour aux adeptes de la sexfrienditude
Bonjour aux zotres

Si les américain(e)s ont donné un nom à la chose, la chose elle-même me semble beaucoup plus internationalement pratiquée... Je vais voir le film mardi soir.


SEX FRIENDS - Nouvelle bande annonce VF

J'aime bien l'idée de départ et la bande annonce mais l'extrait ci-dessous me laisse craindre une certaine lourdeur voire une lourdeur certaine (cela dit, j'ai adoré American Pie...). Est-ce vraiment l'extrait le plus vendeur du film ?


Sex Friends - extrait VF - SEXTO
envoyé par Paramount_Pictures_France

Gnomeo et Juliette (le film)

Bonjour aux fans de Shakeaspeare
Bonjour aux zinzins de nains de jardins
Bonjour aux zotres

Parfois je me dis que j'aimerais bien avoir des enfants rien que pour avoir un bon prétexte pour aller voir tous les films d'animation qui sortent... parfois j'emprunte ceux des zotres, parfois je me souviens que j'ai gardé une âme très juvénile et je vais seule au cinéma... et vous, pendant les vacances de février, allez-vous jardiner ou réviser vos classiques ?



vendredi 11 février 2011

La porte des enfers (de Laurent Gaudé)

Bonjour aux vivant(e)s
Pensées pour les mort(e)s
Bonjour aux zotres


Le prix Qd9 2010 a eu différents mérites, l’un d’entre eux étant de me permettre de lire enfin des romans de trois auteur(e)s que j’avais envie de découvrir depuis un moment et dont des romans attendaient sagement chez moi que je me décide à les ouvrir… Laurent Gaudé était l’un d’entre eux. Si 5 de ses livres squattaient les rayons de ma bibliothèque (en double pour certains), j’ai bel et bien été obligée d’acquérir La porte des enfers, titre choisi par Liliba. Je n’ai pas été vraiment convaincue par ce roman mais il m’a donné envie d’en lire très vite quelques autres de cet écrivain.

Le sujet

L’histoire se passe à Naples à ceux époques distinctes. Au début des années 2000, un homme en agresse un autre par vengeance. Au cours de l’année 80, un enfant de 6 ans est tué d’une balle perdue au cours d’une fusillade laissant ses parents aux prises avec une douleur immense et ravageuse.

Mon avis (spoilers en vue)

Une fois n’est pas coutume, cet avis évoque un point capital du contenu de l’intrigue car c’est cet élément qui motive en grande partie mon avis très mitigé sur le livre.

J’ai dit à maintes reprises sur ce blog que je n’aimais pas les mélanges de genre et le principal reproche que je peux adresser à ce livre et qui explique largement (mais pas uniquement) que je n’ai pas véritablement été accrochée et encore moins bouleversée par ce récit tient à ce parti-pris de l’auteur de plonger brusquement dans le fantastique à peu près à la moitié du roman en même temps qu’il plonge un de ses personnages dans les entrailles de la terre à la recherche de son fils mort.

Je m’attendais à un roman sur le deuil, sur la douleur, sur les ruptures et la folie qu’elle peut susciter. Je n’avais pas imaginé une seule seconde que le titre du roman est donc à prendre au premier degré. J’ai franchement détesté toute la partie infernale du roman. Au-delà du fait d’adhérer ou non sur le fond à cette descente aux enfers choisie par l’auteur (soit, pourquoi pas, c’est son choix), je l’ai trouvée ridicule sur le fond, plate et incohérente, truffée de non sens et sans le moindre intérêt analytique ou métaphysique.

Je suis convaincue que l’ensemble du récit aurait été tout aussi efficace sinon plus si, par je ne sais quelle ellipse (que certain(e)s auraient peut-être taxée de facilité ou jugée frustrante), l’auteur nous avait épargné ces 50 interminables pages dégoulinantes de non-sens et désespérantes de glauquitude.

Et là je touche à un paradoxe que j’ai moi-même du mal à analyser. J’ai souvent coutume de dire que j’aime la noirceur, la cruauté, l’amoralité, le cynisme, la violence en littérature. C’est ce qui m’a plu notamment chez Malaparte, Gunzig, Derey, Calaferte, Ellroy et beaucoup d’autres auteurs. Alors pourquoi ai-je détesté la vision si désespérée des enfers par Gaudé ? Au moment où j’écris cette question, je crois saisir la réponse : le pathos.

Les entrailles de la terre sont sensées puer le souffre mais celles de Gaudé sentent paradoxalement la guimauve et l’artifice. Si les enfers selon Gaudé étaient juste froids, inhumains, désespérants et glauques, j’aurais sans doute pu m’intéresser à leur description (quoique) mais je pense que ce qui me les a rendu insupportables c’est, d’une part, le côté excessivement descriptif de la chose façon visite commentée sous forme de questions-réponses (« mais là, que font-ils ? et maintenant qu’est-ce qui se passe ? d’où vient ce bruit ? et pourquoi ? et comment ? » un peu comme quand un car de touristes arrive dans une fabrique pseudo artisanale de tapis turcs où le guide commissionné sur les ventes se met en devoir de répondres aux questions les plus creuses) et, d’autre part, la dimension larmoyante et dégoulinante de souffrance de tout cela. La surabondance d’effets à finalité lacrymale me gonfle et que les morts souffrent m’insupporte doublement :

- En temps qu’athée résolue d’une part qui pense qu'un corps n'est qu'un corps,
- En temps que baptisée qui se souvient de ses leçons de catéchisme d’autre part, j’ai le souvenir que la foi permet de croire en un monde meilleur.

L’éternité selon Gaudé n’est donc pas une partie de rigolade (et pas nécessairement si éternelle que ça d’ailleurs) et au vu de ce qu’il imagine après le trépas, je m’étonne sincèrement qu’il ait songé à dédier de roman à tous ses morts afin de les distraire dans l’au-delà. Car franchement, dans certaines pages, il y a de quoi donner un coup de calcaire au plus froid des macchabées !

De mon point de vue, les plus beaux passages du roman sont situés au début du roman et concernent la douleur parentale et la rupture induite par le drame familial. Ensuite, ça se gâte nettement et les imprécations et mutilations maternelles m’évoquent plutôt la grandiloquence surannée de certaines tirades des débuts du cinéma parlant que la sincérité d’une émotion nue.

Quelques liens
Paperblog évoque diversement ce roman et son auteur
Liliba a sélectionné ce titre dans le cadre du prix Qd9 2010.

Conclusion

Pas mortellement ennuyeux mais loin d'offrir des heures de plaisir paradisiaque.

9 questions (à Thomas Gunzig)

Salut Thomas
Coucou Minitrip
Bonjour les zotres

Après
Philippe Jaenada il y a quelques jours et avant Fabrice Humbert la semaine prochaine, voici mes 9 questions à Thomas Gunzig et surtout ses 9 réponses truffées d'humour et d'un certain bon sens voire d'un bon sens certain. A noter, un cours accéléré de rédaction de nouvelles en réponse à la question 7 !
Une fois de plus, la tentation a été grande d'ajouter des commentaires perso mais j'ai eu la force de résister à la tentation... Tout ce qui suit m'a donc été envoyé tel que par l'auteur...

Salut Cécile,
C’est chouette de voir à quel point vous avez détesté Kuru...
Enfin, je veux dire, c'est une émotion et c'est toujours ça (j'emploie ici la technique classique de l'auteur qui se dit que, au moins, son texte ne laisse pas indifférent...). Enfin bref, voici pour les questions et surtout les réponses...

01 - Lisez-vous ce qu’on dit de vous sur les blogs ?
Bien entendu. C'est un des vices dont je suis le plus honteux, juste après celui de chercher dans mon nez et de faire des boulettes que j'envoie au plafond...

02 - Quel est votre coup de cœur littéraire parmi vos lectures de l’année 2010 ?
Ho ben puisqu'on ne doit pas choisir un livre publié en 2010 (mais lu en 2010) je crois que le "Bar sous la mer" de Stéfano Beni est un vrai coup de coeur. J'adore ce livre, c'est écrit avec une pêche incroyable, c'est drôle, c'est profond... Ça faisait longtemps que je n'avais pas lu un truc qui me donne autant envie d'écrire...

03 - Vous avez l’art d’écrire les pires atrocités sur un ton léger qui m’évoque notamment certaines scènes de Reservoir Dogs de Quentin Tarantino mais aussi certaines pages de Kaput et de La Peau de Curzio Malaparte. Et puis, en lisant la nouvelle qui donne son titre au fabuleux recueil « Il y avait quelque chose dans le noir qu’on avait pas vu », j’ai songé au film No Mans Land. Que pensez-vous de ces références (toutes extrêmement élogieuses de mon point de vue) ?
J'adore Tarantino (bien que j'ai été un peu déçu par son dernier, le truc avec les nazis). Réservoir Dogs et Pulp Fiction sont de vraies références pour moi... Malaparte, j'ai un peu honte, mais je n'ai jamais lu...
Pour "No Mans Land", j'ai bien entendu adoré ce film. Tout à fait le genre de film que j'aurais aimé tourner. Merci pour ces comparaisons, elles sont en effet très très flatteuses...

04 - La plupart de vos personnages sont froidement psychopathes, résolument amoraux ou totalement déjantés. D’où vous vient cet intérêt pour des êtres aussi délicieux ?
Franchement, je ne sais pas... J'ai une certaine facilité à les décrire, je crois.... Sans doute qu'au fond de moi, il y a un type comme ça... Mais le type comme ça cohabite avec un autre type qui pleure dans "Monstre et compagnie"... Je dois avoir un problème, mais comme j'aime bien avoir un problème je ne le traite pas...

05 - Les rares personnages apparemment« normaux » de certaines de vos nouvelles se retrouvent propulsés dans des situations hostiles et incontrôlables où ils n’ont d’autre choix (dans le meilleur des cas !) que de devenir victimes ou bourreaux (ex le jeune clandestin franchement arrivé en Belgique par conteneur ou le jeune GO guide touristiques pour femmes mûres). Le bonheur est-il une option littéraire dénuée d’intérêt ?
C'est-à-dire que je suis fasciné par le bonheur dans la mesure ou c'est un sentiment que je comprends absolument pas. Cela ne veut pas dire que je suis malheureux... Ça veut juste dire que je suis un peu agité... Je suis content dix secondes, et puis hyper triste dix secondes, et puis hyper cynique dix seconde, et puis hyper méchant dix seconde, et puis hyper gentil, et puis hyper salaud, et puis hyper amoureux et puis ça recommence.... À la fin de la journée, j'aime bien dormir.

06 - Autant j’ai adoré Mort d’un parfait bilingue au point de le sélectionner pour le prix Qd9 2010 (en fait c’est le livre que j’ai préféré parmi ceux que j’ai lus au cours de l’année écoulée), autant j’ai détesté Kuru. Comprenez-vous ces points de vue très tranchés et opposés sur ces 2 romans ?
Heuuu... Oui... Les gens sont parfois tellement bizarres...

07 - Vous avez été connu pour vos nouvelles avant de l’être pour vos romans. Quelles sont les principales difficultés liées à la forme narrative de l’un et l’autre de ces genres littéraires et, selon vous, pourquoi la nouvelle est-elle encore considérée comme un genre mineur ?
La nouvelle est considérée comme un genre mineur parce qu'elle ne se vend pas. Sinon, techniquement, il n'y a pas de vraie différence... Je sais qu'il y a un tas de gens qui se gargarise de fines analyses... Je crois que la différence principale c'est... la longueur... Du coup, dans un roman, il peut y avoir des scènes d'articulations ("pendant le trajet de retour, il resta un long moment à contempler le bout de ses chaussures. Il se demanda pourquoi elles étaient si sales et puis il se souvint avoir marché dans un gazon trempé constellé de mottes de terres que des taupes nymphomanes avaient du creuser durant la nuit de la sainte valentine....") Dans une nouvelle, c'est un peu plus resserré... De toute façon, maintenant, j'ai juste envie de réaliser des films de monstres extraterrestres...

08 - La grande force de vos nouvelles et de se terminer sur des non dits laissant croire à des fins ouvertes alors que tout est déjà joué ce qui permet à vos lecteurs d’éprouver un curieux mélange de jubilation et de culpabilité en imaginant sans peine les inévitables atrocités qui suivent forcément le point final. N’est-ce pas le comble de la perversité que de faire prendre conscience au lecteur qu’il est aussi voire plus tordu que vous ?
Exactement. Tout le monde est plus tordu que moi. C'est ce que je me tue à répéter à ceux que je croise. Je suis un monstre d'équilibre.

09 - Comment va Minitrip ces temps-ci ?
Je crois qu'elle tourne des pornos californiens à la chaine. La journée ça va. Le soir, quand elle toute seule, elle rêve de moi... Mais c'est trop tard... Je pourrais jamais passer après tout ces mecs...

mercredi 9 février 2011

Il y avait quelque chose dans le noir qu'on n'avait pas vu (de Thomas Gunzig)

Bonjour aux nyctalopes
Bonjour aux zotres

Avec ce recueil de nouvelles, Thomas Gunzig prouve une fois de plus qu'il a un sens aigu du bon titre et celui-ci annonce la couleur : noir, noir, très noir...

Mon avis

J'ai retrouvé dans Il y avait quelque chose dans le noir qu'on n'avait pas vu, tout ce que j'avais adoré dans Mort d'un parfait bilingue :
- une langue moderne et efficace,
- une amoralité assumée,
- des personnages au mieux déjantés au pire plus qu'inquiétants en passant par toutes les variations possibles dans les registres victimes ou psychopathes tant on a l'impression que le monde de Gunzig est binaire, peuplé de ceux/celles qui tuent d'un côté et ceux/celles qui crèvent de l'autre, sans que, jamais, le trait ne semble manichéen ou caricatural,
- un désespoir omniprésent au sens où il ne saurait y avoir d'issue heureuse aux récits du recueil.
Ce dernier point m'amène à un constat aussi réjouissant qu'inquiétant : Thomas Gunzig possède le talent particulier de terminer ses nouvelles sur des non-dits alors que tout est déjà joué et que ce qui suit le point final est parfaitement explicite. Dès lors, le/la lecteur/trice se retrouve dans la situation de visualiser ces scènes, de les imaginer dans toute leur horreur et... d'aimer ça !

Même si j'ai beaucoup aimé Carbowaterstoemp (évoqué hier), ce recueil est à mon avis très supérieur par la densité des textes, par leur construction implaccable et par cette empreinte durable qu'ils impriment lors de la lecture.

Toutes les nouvelles du recueil sont des pépites charbonneuses, cauchemardesques, noires comme une nuit infernale. Quelques semaines après ma lecture, je les garde toutes en mémoire et je sais qu'au moins la moitié d'entre elles resteront gravées longtemps dans mon esprit. Vous qui me lisez, faites le test, de combien de nouvelles gardez-vous un souvenir net et précis ? Si vous avez lu Buzatti, Gary, Gavalda, Maupassant, Ron l'Infirmier, Forster Wallace et plein d'autres (je place Zweig à part) , de combien de leurs textes pourriez-vous raconter le déroulement et la chute ? Pas tant que ça hein ? Vite lues, vite oubliées les nouvelles ? Pas celles de Thomas Gunzig.

Les nouvelles

Elle mettait les cafards en boite
Que fait une infante d'Espagne juste avant d'enfiler sa robe de mariée ?
Où il est prouvé que "chacun(e) ses priorités"...

Sélection naturelle
Que faire quand on gagne une croisière pour 2 et qu'on ne veut pas avouer qu'on est seul (et encore moins pourquoi on l'est) ?
Ceci n'est que le point de départ d'une nouvelle où le personnage principal ne restera pas seul très longtemps...

Gentils organisateurs
Que faire pour ne pas craquer ?
Complètement sordide, pas gentil du tout et terriblement efficace.

La dernière intra-veineuse de Jean-Pierre X
Que faire sinon creuser toujours plus profond ?
L'absurde mêlée au désespoir...

Il n'y aura pas de debrieffing ce jeudi à 19h00
Que faire quand Minitrip n'est pas fidèle ?
Une atmosphère violente, une vision futuriste où l'on entrevoit des flashes de Blade runners et des souvenirs de BD de Moebius et Jodorowski...

On ne retournera jamais dans ce coin pourri
Que faire quand on est capturé par l'ennemi et enchaîné à un pont ?
Le fossé du film No man's land n'est sans doute pas très loin de ce pont...

Il y avait quelque chose dans le noir qu'on n'avait pas vu
Que faire quand on est perdu et qu'on risque d'arriver en retard à une fête ?
Un je ne sais quoi de légende urbaine déjà entendue sous diverses formes (animales) et fort bien revisitée... Frissons garantis.

Le soleil avait du savon dans l'oeil
Que faire quand on est sensible à la poésie ?
Une nouvelle que ne renieraient pas Dongola ou Derey...

Mais d'où vient ce foutu courant d'air ?
Que faire quand une exécution capitale retarde un dîner familial ?
Où il est prouvé que "chacun(e) ses problèmes"...

Conclusion

Un moment de lecture fort et délicieusement malsain et donc indispensable... J'adore !

mardi 8 février 2011

Carbowaterstoemp : et autres spécialités (de Thomas Gunzig)

Bonjour aux gastronomes belges
Bonjour aux dévoreurs de nouvelles
Bonjour aux zotres

Thomas Gunzig souffle le chaud et le froid dans ma bibliothèque. J'ai aaadooorrré (rien de moins) son premier roman Mort d'un parfait bilingue qui est le livre que j'ai préféré parmi toutes mes lectures 2009 et que j'ai donc fort logiquement proposé dans la sélection du prix Qd9 2010. Pour mon plus grand plaisir, ce livre figure parmi les 3 finalistes dans la catégorie Roman francophone. J'ai en revanche (presque) détesté Kuru.

J'étais bien embêtée pour au moins 2 raisons :
1/ je n'aime pas ne pas aimer un livre (logique)
2/ je voulais poser 9 questions à l'auteur comme je l'avais fait avec Laurain, Ravalec et Reinhard l'an dernier et mon avis sur Kuru est tellement négatif que je n'osais pas le recontacter (ma déonto-blogo-logie m'interdisant de renoncer à dire ce que je pense pour le simple plaisir de mettre en ligne un échange de mails avec un auteur). Et puis si, j'ai quand même osé... et ses réponses à mes 9 questions sont un vrai régal ! Elles seront en ligne vendredi.

Mon avis

D'ici là, c'est à un autre festin à la sauce que je vous convie. Il y a quelques semaines, grâce à Cynthia, j'ai découvert un appétissant recueil de nouvelles où j'ai retrouvé les ingrédients qui m'avaient fait saliver chez cet auteur. J'ai donc dévoré ces textes croustillants organisés comme des agapes tantôt acidulées tantôt amères et jamais (trop) sucrées.

J'adore l'atmosphère pesante, tantôt inquiétante, tantôt glauque, tantôt les deux à la fois qui habite chaque texte. Bref, je me suis régalée et sachez si vous vous farcissez de la métaphore culinaire à toutes les sauces depuis quelques lignes ce n'est pas pour rien : Carbowaterstoemp est constitué comme un menu dont on ne sait pas trop à l'avance à quelle sauce les personnages seront mangés... mais faites confiance à Gunzig, ils le seront de toute façon... Une autre originalité du recueil est de proposer à 4 reprises de courtes variations sur le même thème générique (très large certes), sur une situation de départ comparable ou une simple correspondance...

Les nouvelles

1 - Amuse-bouches et pâté de lièvre, pages 9 à 40
Quand un assassin n'a pas encore eu l'occasion d'exercer ce pour quoi il sait être fait... ou les préparatifs d'un psychopathe auto proclamé super intelligent...

2 - Hors d'oeuvre et canapés, sous le signe du Chorizo, pages 41 à 58
Une ado de 15 ans, pianiste virtuose est laissée seule et désoeuvrée pendant les vacances... Une excellente occasion de faire quelques expériences...

3 - Combinaison de dîners à l'hôtel, pages 59 à 90
Sous ce titre sont regroupées 5 courtes nouvelles plus ou moins savoureuses, ma préférée étant la première.
Trop froid : Que se passe-t-il quand trois fils à papa prénommés Pierre-Henri, Jean-Nicolas et Kader s'offrent un séjour de ski en Autriche ?
Trop chaud : Des vacances, 2 parents, 2 enfants, un chien, une voiture, une plage : d'innombrables sources de problèmes...
Trop tôt : Pas de bol de tomber sur une chaudière en panne quand on est en déplacement professionnel à Berlin
Trop tard : L'amour est-il compatible avec un championnat de fléchettes ?
Trop gras : Quand deux journalistes sont accueillis comme des princes dans la campagne hongroise...

4 - Cinq casse-croûte pour le concert Take five, pages 91 à 122
Dès les premières lignes de chaque texte, on sait que l'atmosphère est pesante, étrange, décalée et que, dans chaque texte, des choses pas très jolies-jolies vont arriver et c'est justement ça qui est délicieux... Dès lors, le plaisir ressenti lors de la lecture apparaît un brin coupable, comme un péché de gourmandise non assumé face à une jupette taille 38 qui nous nargue du haut de son -70% pendant les soldes.
Adagio : que se passe-t-il quand des rats ont faim ?
Largo : que se passe-t-il quand un type se fait larguer par une fille ni très jolie ni très gentille ?
Allegro : que se passe-t-il quand son chat est allé se planquer chez les voisins ?
Lento : que se passe-t-il quand une danseuse grimpe aux arbres ?
Andante : que se passe-t-il quand on fait un peu trop de mélanges ?

5 - Les Atouts de la gastronomie au grand air, pages 123 à 153
5 variations autour du pique-nique et des divers aléas qui peuvent survenir lors d'une balade à la campagne. Les cornichons, le chocolat, le fromage, les sandwich mous et le beurre salé figurent parmi mes nouvelles préférées du recueil. Ce sont aussi les plus légères, les plus amusantes.

6 - Trois sucreries nationales Royaumes, pages 155 à 200
Le grand duc et Le petit prince ont une dimension très sociale et offrent une vision très sombre de la Belgique (mais ces nouvelles auraient pu être écrite dans (pratiquement) n'importe quel pays d'occident). Ces nouvelles figurent aussi parmi mes préférées. La comtesse est la seule nouvelle vaguement SF du lot et, à mon avis, la moins réussie... c'est en tout cas la seule que je n'ai pas aimée.

7 - Gastronomie hospitalière. Figures du transfert. Episodes cliniques, pages 201 à 238
L'hôpital en question est psychiatrique... on ne pouvait évidemment pas s'attendre à moins de la part de l'auteur.

Quelques liens

Lali aime Gunzig, aime les nouvelles et ce recueil de nouvelles est son préféré

Conclusion

Miam miam !

lundi 7 février 2011

La moustache (Emmanuel Carrère)

Bonjour aux moustachu(e)s
Bonjour aux imberbes et glabres de tous poils
Bonjour aux zotres

Il y a quelques jours, je vous faisais part de mon enthousiasme total suite à la lecture du roman D'autres vies que la mienne (en lice pour le prix Qd9 2010). C'était ma 2e incursion dans l'oeuvre de Carrère, ma première approche avait été nettement moins positive (euphémisme) puisque j'avais détesté l'adaptation cinématographique que l'auteur avait faite de son roman éponyme La moustache. avec Emmanuelle Devos et Vincent Lindon. J'ai donc eu envie de lire le livre pour voir si j'allais plus adhérer à l'oeuvre écrite qu'au film. La réponse est indiscutablement oui même s'il s'agit d'un oui nuancé...

Le sujet

Marc décide un jour de raser sa moustache mais personne dans son entourage ne semble s'en apercevoir... pire, sa femme Agnès, ses collègues, ses amis lui affirment qu'il n'a jamais porté de moustache. Entre la mauvaise plaisanterie et la folie, les interprétations varient et se succèdent dans l'esprit de Marc tandis que ses relations aux autres se détériorent inexorablement.

Un extrait du roman
A propos d'un film avec Cary Grant vu par hasard à la TV

Le mot fin apparut, salué par les applaudissements du concert, puis la speakerine vint leur souhaiter une bonne nuit. Ils restèrent cependant assis sur le canapé, côte à côte, les yeux fixés sur l’écran déserté. Agnès passa sur une autre chaîne, mais il n’y avait plus rien. Le film, surtout pris en route, laissait une impression curieuse, on sentait que les divers éléments qui le composaient ne s’accordaient pas ensemble, que l’histoire réaliste et gnangnan de la fille-mère et du souriant docteur jurait avec celle du village de fous où on lynchait le boucher en s’apercevant qu’il était médecin, où les gens commettaient des meurtres après avoir purgé la peine qui les sanctionnait, et il lui semblait presque qu’au lieu de regarder le film, ils l’avaient composé tous les deux au fur et à mesure, sans se concerter, ou bien chacun s’efforçant de saper le travail de l’autre, comme on réaliserait un cadavre exquis en désirant qu’il soit raté pour énerver les autres participants. C’était probablement ainsi, songea-t-il, qu’avaient travaillé les scénaristes, en se tirant dans les pattes. La neige continuait à tomber sur l’écran, cela durerait toute la nuit. Il regretta de ne pas avoir de magnétoscope pour continuer. Page 51

Mon avis

Si, exceptionnellement, j'ai eu envie de citer un extrait du roman avant de rédiger ma critique, c'est qu'il constitue une bonne approche de ce que je pense du roman et je me demande si l'auteur n'a pas rédigé ce passage en guide de métaphore. De mon point de vue, le problème décrit pour ce film vu par hasard par les deux protagonistes du roman est exactement celui du livre : la coexistence d'éléments disparates qui se heurtent plus qu'ils ne créent une cohésion. A la lecture, j'ai eu le sentiment qu'Emmanuel Carrère avait été frappé de schizophrénie dans son roman et qu'une partie de lui passait son temps à sapper le boulot d'écriture et de structuration de l'oeuvre réalisé par ailleurs.

J'ai donc trouvé le roman bancal et le statut du narrateur m'a gênée. Le roman est rédigé à la 3e personne du singulier mais adopte clairement le point de vue de Marc dont il décrit les réflexions et leur évolution au fur et à mesure du développement du sujet. Il ne l'adopte cependant pas de façon radicale et une ambiguité constante demeure. J'ai bien conscience que celle-ci est volontaire mais elle m'a surtout semblé singulièrement pratique !

Rester dans le flou ne permet pas seulement de perdre le lecteur et de le tenir en haleine (je ne le fus pas), il constitue aussi (et surtout ?) un confort paresseux pour l'auteur qui, dès lors n'a même plus à s'embêter à faire un roman cohérent, à s'enquiquiner à donner du sens ?

Emmanuel Carrère a évacué le problème de la vraisemblance la plus élémentaire et c'est bien dommage surtout que dans un même temps, il s'entête sur des pages et des pages à décrire par le menu (et sans réelle analyse) les différentes hypothèses et stratégies élaborées par Marc. C'est terriblement premier degré et cela devient vite fastidieux voire ennuyeux.

La thématique abordée m'a fait songer à Rhinocéros, à Truisme et aussi... à cette récente pub Herta que je déteste parce qu'elle donne une image du couple que je déteste entre cruauté, incommunicabilité, mensonge, narcissisme de pétasse de la femme et lâcheté passive et stupide de l'homme. J'ai bien conscience que cette pub est sensée être marrante, légère et anecdotique mais elle ne passe pas.

Que dire de la fin ?
Je préviens... Début de Spoilers dans ce paragraphe.

La fin a scotché certain(e)s. J'ai juste trouvé qu'il s'agissait d'une facilité de plus au moment où le livre commençait à prendre un tournant plus substantiel et analytique, au moment où l'angoisse commençait à monter. Carrère a brutalement déserté son sujet comme son personnage a brusquement fuit la France et la réalité (ou son absence...).

Quelques liens

Pimprenelle met Carrère à l'honneur avec plein de liens vers des critiques de différents romans de l'auteur
Clara a adoré

Conclusion

Un peu... rasoir...

dimanche 6 février 2011

Lectures bloguesques (de la semaine 05-2011)

Bonjour Cynthia
Bonjour Liliba

Bonjour ICB
Bonjour les zotres


Pour accéder au message de référence cliquer sur le mot Quand !
Source du dessin

Quand Cynthia adore
Parfois, quand Cynthia déteste un livre, je ne suis pas d'accord avec elle (exemple Papoua). Parfois, quand Cynthia adore un livre, je ne suis pas d'accord non plus (exemple La maladie de la mort).
Il arrive cependant que, parfois, je n'aurais pas mieux dit pour exprimer tout l'intérêt d'un livre, que dis-je d'un monument incontournableuh dont j'ai parlé ici. La servante écarlate est en lice pour le prix Qd9 2010 dans la catégorie roman étranger.

Quand Liliba est conquise
J'aime faire découvrir des livres. Parfois les présentations ratent et d'autres fois elles réussissent. J'avais dit tout le bien que je pense de L'origine de la violence
ici et j'avais aimé ce livre au point de le sélectionner dans la catégorie Roman Français du prix Qd9 2010.

Quand les grands zesprits se rencontrent
Sur son burp chaud comme la braise, Mister ICB a effectivement eu la même idée de titre que moi (et avant moi certes) concernant un message d'actualité... Aucun plagiat de ma part, juste quelques références générationnelles communes ! Salut à toi Mister ICB !

samedi 5 février 2011

France-Danemark en Suède (et en musique)

Bravo aux joueurs français
Bonjour aux zotres

Si vous avez raté le match dimanche dernier, en voici quelques images ! Cocorico !