vendredi 23 janvier 2009

Le cri (Laurent Graff)

Bonjour aux zamateurs/trices de chahut et aux fondu(e)s d'expressionnisme
Bonjour aux zotres

Le cri est d'abord le plus célèbre tableau d'Edward Munch. En norvégien, cette toile de 1893 s'intitule Skrik. Il existe 4 versions de ce tableau dont deux furent volées puis retrouvées, l'une en 1994 et l'autre en 2004 en même temps qu'une autre toile de l'artiste intitulée La Madone (dont il existe également plusieurs versions), que j'adore aussi pour des raisons très différentes de l'impression somme toute angoissante que laisse ce fameux cri.

On n'a pas besoin de savoir tout ça (mais c'est un peu mieux) pour lire le roman éponyme de 122 pages de Laurent Graff.

Le sujet

L'auteur part du vol du tableau et raconte une étrange épidémie mortelle touchant 90% de la population qui meurt dans d'atroces souffrances auditives et que l'on retrouve la visage déformé et la bouche tordue de douleur. Il retrace le quotidien d'un survivant, péagiste de métier, témoin quasi indifférent et en tout cas très fataliste de cet inexplicable chaos.


Mon avis

L'idée de départ est originale et plutôt bonne et l'auteur sait créer une atmosphère qui, tour de force, colle assez bien (mai avec beaucoup plus de légèreté !) à l'impression que peut donner la toile : solitude, angoisse, mystère, immobilité... La prose de l'auteur est agréable à lire et certains passages sont touchants, d'autres franchement drôle et ce cocktail produit un livre qu'on sirote avec plaisir jusqu'au cri final qui ne m'a pas déçue contraiment à pas mal de fin de romans ces derniers temps.

Quelques extraits

Elle se rend à l'hôpital tous les jours. Un soi, sous les fenêtres de son bureau, s'est produit un accident au feu rouge. Le carrefour est réputé dangereux et les sinistres y sont fréquents. Alertée par les sirènes des ambulances, elle a regardé à travers le carreau. Elle a d'abord reconnu une voiture ; elle s'est dit qu'il s'agissait du même modèle. Elle a ensuite aperçu le deuxième véhicule impliqué dans le choc et la coïncidence devint alors trop forte pour que ce ne soit pas bel et bien la réalité, si improbable et stupéfiant que cela paraisse. Les routes de son mari et de son amant s'étaient croisées sous ses fenêtres et la confrontation s'était soldée par un accident. Aurait-il pu en être autrement ? Si proches l'un de l'autre en cet instant, réunis par le hasard des chemins, auraient-ils pu se croiser indifféremment et échapper à la collision ? (P.27)

Les malades dans le coma peuvent ressentir la proximité d'un être cher. Alors, elle leur donne la main : la droite à son mari, la gauche à son amant. Quelle main doit-elle tenir plus fort ? Elle a le sentiment qu'elle ne peut pas les aider avec une même conviction. Avec l'honnêteté et l'équité nécessaires. Il y a inévitablement concurrence. Elle est ce carrefour où ils se sont téléscopés. Il faut en faire passer un avant l'autre. (P.29)

Je n'ai pas beaucoup voyagé dans ma vie. Je n'ai, par exemple, jamais pris l'avion. (...) Soit on fait le tour du monde, soit on regarde le monde tourner. Au final, on voit la même chose. (P.41)

(...) l'ennui n'a jamais été un problème pour moi : j'aime l'ennui. J'y vois une forme de vie dépuillée très suave, un cimat clément pour l'âme, un hamac suspendus aux palme du temps. L'ennui et l'autoroute s'accordent parfaitement pour inoculer une douce monotonie, comme un fil fin pénétrant le chas de l'esprit, et apaiser nos consciences tourmentées. Quand d'autres s'irritent, s'impatientent, gesticulent, moi je me laisse envahir avec délectation par la lassitude.(P.42)


Je souris à la mort qui m'attend et aime la vie qui m'y précipite. (P.92)

Conclusion

Un cri du coeur !

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Chouette, un nouveau livre à lire ! D'autant plus que j'ai déjà noté des trucs de cet auteur.

Cécile Qd9 a dit…

Ah oui ? quoi ? je me demandais justement ce qu'il avait écrit d'autre

Nathalie Croisé a dit…

J'ai eu beaucoup plus de mal à m'accrocher que toi. La noirceur du sujet et l'impression d'étouffement parfois m'ont géné. Mais c'est vrai que, dans tous les cas, il mérite le détour.

Anonyme a dit…

Un livre qui aurait été tout à fait d'actualité cette semaine pour toi : Voyage, voyages

http://www.ledilettante.com/fiche-livre.asp?Clef=976

In Cold Blog a dit…

Ah j'avais adoré moi aussi...