mercredi 9 janvier 2008

Simone de Beauvoir (aurait eu 100 ans aujourd'hui)






Bonjour
les femmes
Bonjour

les zotres








J'ai beaucoup d'admiration pour Simone de Beauvoir et, comme beaucoup, je regrette que le Nouvel Obs ait jugé souhaitable de choisir pour sa Une une photo d'elle nue. Quel rapport avec son oeuvre, avec sa pensée ? Aurait-on imaginé une Une dénudée pour les 100 ans de Jean-Paul Sartre ? Evidemment non ! Alors pourquoi cette énorme faute de goût envers sa compagne ? Une des réponses évidentes et désespérante à la fois est : parce que c'est une femme !

En soi, la photo est plutôt belle et je n'aurais pas trouvé à redire si le Nouvel Obs l'avait publiée au sein de son dossier mais en faire sa Une est si ostensiblement racoleur et si éloigné du personnage Beauvoir que ça me fout en rogne. Voila, c'est dit.

Revenons à nos moutons... enfin... à Simone dont la biographie sur Wikipedia me semble un brin superficielle et peu inspirée (mais elle a le mérite d'exister). Je ne suis pas une inconditionnelle de la femme, de la personne privée. Certains aspects de sa relation avec Sartre me chiffonnent un peu tant je les trouve en apparente contradiction avec la dimension féministe et libre du personnage public.

Je suis encore moins fan de certaines de ses prises de positions politiques confinant à l'aveuglement. Ses sympathies communistes ne sont pas ses fréquentations les plus glorieuses et ses voyages en Russie, à Cuba, en Chine ne contribuèrent apparemment pas à lui ouvrir les yeux sur une idéologie pour le moins opprimante.

Si j'admire et respecte profondément Simone de Beauvoir c'est en tant que penseuse féministe (non, cet adjectif n'est pas péjoratif et ce n'est pas non plus une insulte) et auteure géniale. J'ai lu 5 ou 6 livres de Beauvoir. Le premier fut ses "mémoires d'une jeune fille rangée" alors que j'avais 15 ans. C'est un merveilleux portrait d'adolescente mais surtout, ce livre dépeint magistralement un milieu, une époque révolue.


Si "tous les hommes sont mortels" m'est tombé des mains au bout de 50 pages (sans que je comprenne grand chose en fait) et que "les mandarins" (qui lui valut le prix Goncourt en 1954) attend toujours que je l'ouvre sur un rayon de ma bibliothèque, j'ai dévoré et adoré des romans comme "L'invitée" (délétère et très moderne) ou "La femme rompue", dur portrait d'une femme seule, aigrie, rompue (de fait) dont Beauvoir disait :


"La femme rompue est la victime stupéfaite de la vie qu'elle s'est choisie : une dépendance conjugale qui la laisse dépouillée de tout".
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Il y a quelques années, j'ai eu la chance de voir une adaptation théâtrale de ce texte poignant. Récemment, il fut rejoué par Evelyne Bouix.



Mais, ce que j'ai préféré de Beauvoir, ce sont les deux tomes du "deuxième sexe", ouvrage magistral publié en 1949 et hélas toujours d'actualité sur bien des points. Ce livre reste un outil de réflexion pertinent, précieux, inégalé.
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Le premier tome sous titré "les faits et les mythes" possède une dimension historique, psychanalytique, sociétale et universelle sur la condition féminine, sur les rapports hommes/femmes dans un monde, une société créée, dirigée par et pour les hommes où la norme est masculine et l'exception féminine.


Le second volume intitulé "l'expérience vécue" aborde concrètement les étapes de la vie d'une femme : règles, maternité, avortement, défloraison, ménopause, sexualité, etc. Là encore, la pertinence de la plupart des observations de l'auteure est évidente et dramatique.
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C'est peut-être ce dernier aspect qui, de nos jours, constitue un des points faibles du livre tant il est vrai que certaines généralités de l'époque peuvent aujourd'hui être lus et reçus sous l'angle du pathos. L'autre point faible du livre réside dans les quelques occasions où Beauvoir voit dans le marxisme et la révolution communiste des pistes de solutions politique à l'aliénation des femmes tout en reconnaissant toutefois que les conditions de l'égalité tiennent plus à l'évolution des mentalités qu'à celle des lois.
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Ce dernier point me semble évident et si je dois retenir une chose dont Simone de Beauvoir m'a convaincue c'est que nous sommes des êtres de culture et non de nature et c'est bien ainsi qu'il faut comprendre sa célèbre formule "on ne naît pas femme, on le devient".

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Concernant la couverture du Nouvel Obs, il y a encore autre chose à y redire : elle a été retouchée.

Plus d'information ici.

Cécile Qd9 a dit…

L'article est excellent et la retouche la cerise aigrer sur ce gâteau de m&auvais goût... Je n'ai qu'un mot à dire (que je pèse bien évidemment) : LA-MEN-TA-BLEUH

Anonyme a dit…

Beauvoir, c'était quelqu'un. Je ne suis pas choqué par la photo en soi, plus par la retouche du cliché… J'ai même cru la première fois que c'était une photo d'une autre femme, car je n'imaginais même pas son corps comme ça. Ça veut dire qu'on ne lui accorde même pas ce qu'elle était. On veut la transformer en autre chose. C'est vraiment à gerber. D'accord avec ton portrait sinon : auteur géniale, certaines prises de position inconcevables. Sa liaison avec Sartre est extraordinaire (jusqu'à ce livre "La cérémonie des adieux", où elle s'efforce de lui tirer quelques idées philosophiques fulgurantes, alors qu'il ne pense qu'à picoler et à mourir). Leur union comporte des tas de contradictions entre ce qu'elle disait et ce qu'elle faisait. Mais
c'est un peu notre lot à tous.

Cécile Qd9 a dit…

où je ne suis pas d'accord avec toi, Thierry, c'est que je ne pense pas qu'il faille imaginer le corps de quelqu'un(e) pour lui accorder "d'être". J'aurais même tendance à penser + ou - l'inverse. Je préfère définir les gens par leur esprit, leur personnalité, leur culture, leur humour, leur intelligence plutôt que par la façon dont je peux éventuellement les imaginer à poil (ce que je ne fais d'ailleurs jamais...). Bref, je pense justement que c'est assez normal de ne pas avoir d'image mentale du corps de Simone de Beauvoir vu qu'elle n'était pas danseuse au Lido mais philosophe et écrivaine. ;o)

Petite précision : "la Cérémonie des adieux" a été publié après la mort de Sartre. C'est un livre de souvenir(s).

Entièrement d'accord avec toi à propos des contradictions de leur couple. Certes, nous en sommes tou(te)s pétri(e)s mais certains paradoxes me semblent plus difficiles à comprendre que d'autres.

Cécile Qd9 a dit…

Un autre hommage élogieux ici :
http://tietie007.over-blog.com/article-15694623.html

Neblina a dit…

je suis tombée par hasard sur ton blog en lancant une recherche sur le livre de Cecile Slanka, et j'ai lu ce que t'as écrit sur Simone de beauvoir
Ces derniéres semaines je lis tous ses livres, j'ai commencé par l'invitée, la femme rompue, les belles images, et je suis entrain de lire son autobiographie, mnt je lis la force des choses, tome 2
je suis d'accord avec toi, je ne la qualifierai pas de féministe, ce serait faire ce qu'elle n'approuvait pas, assigner des etiquettes, alors que ce qu'elle anhelait était de vivre sa vie en rompant avec les étiquettes, les prejugements et les traditions, ça a choqué une société qui met des limites aux femmes, alors que pour elle ça n'a pas pourquoi être un obstacle
De son autobiographie mon preféré est mémoire d'une jeune fille rangée, parce qu'avec le temps elle cessera d'être rangée pr donner libre route à ses ambitions, ses rêves ses projets, elle s'acharnera à vivre, être heureuse sans prendre de modele ni d'ideal, son unique guide étaient ses desirs de bonheur et de decouverte
Pour moi c'est l'autobiographie d'une femme accomplie, et son exemple a montré au autres femmes que c'est possible tant qu'on a la volonté