lundi 11 mai 2009

Le Père de la Petite (de Marie Sizun)

Bonjour Liliba
Bonjour les zotres

J'adresse un énoooooorme merci à Liliba pour m'avoir offert ce livre de Marie Sizun. Ce fut une très jolie découverte littéraire.

Le sujet

Pendant la 2e guerre mondiale, la vie de la Petite se caractérise par une liberté totale et insouciante doublée d'un amour admiratif et fusionnel avec sa mère. Cet univers enfantin va s'écrouler peu à peu à la perspective du retour d'un prisonnier guerre malade et colérique, un père inconnu e redouté qu'elle apprivoise avec le temps.

Mon avis

Le Père de la Petite est un petit bijou de pudeur, de sensibilité et d'émotions. Avant de lire le livre, je ne savais pas que Marie Sizun était née en 1940. Je la pensais plus jeune et j'imaginais volontiers qu'elle racontait dans ce premier roman (publié en 2007) l'histoire d'une tante, d'une grand mère... Mais, vraiment, peu importe la part de vérité de cette histoire, l'authenticité se trouve dans la justesse des mots, la finesse des descriptions et des analyses.

On assiste bien souvent à des tentatives plus ou moins hasardeuses de récits du point de vue d'un enfant et, la plupart du temps ces textes sonnent faux car les pensées et le vocabulaire enfantins s'accordent mal avec une réflexion et une écriture littéraires. Marie Sizun a eu l'intelligence de ne pas chercher à singer l'enfance et d'écrire à la troisième personne du singulier en choisissant des phrases courtes, un registre très plat, factuel, proche de l'écriture blanche d'Annie Ernaux.

Le résultat est saisissant et m'évoque aussi C'est la guerre de
Louis Calaferte, livre qui commence quand l'auteur a 11 ans et s'achève 5 ans plus tard alors qu'il est presque un homme et où l'auteur réussit la prouesse de transcrire cette évolution dans son style.

Les fils de l'histoire si superbement contée par Marie Sizun se nouent et se dénouent au rythme ou la Petite les subit, les provoque, les comprend ou non.

Un minuscule reproche (un détail, vraiment) pour finir : l'usage systématique et répété des mots "la petite" est un peu pesant surtout au début. Quelles variations à base de "l'enfant" ou "elle" ou "France" (puisque tel est son prénom) seraient parfois les bienvenues et allègeraient le récit.

Quelques liens


4e de couverture
ici
Critiques élogieuses chez
Liliba Miss Orchidée Sylire etc.
Les zotres, dites-le moi si vous voulez que j'ajoute un lien vers votre critique.

le site de l'éditeur Arléa (très belles couvertures)

Quelques extraits


Une chose qu'elle ne comprend pas, c'est que sa mère dise toujours en parlant de lui ton petit papa. Pourtant l'homme qu'elle a vu sur les photos est plutôt grand, c'est quelqu'un comme le crémier, ou le chacutier, en plus jeune, peut-être, moins laid. En l'évoquant sa mère pleure parfois, surtout les derniers temps. La petite n'aime pas ça. (P.8)

La petite attend son père Elle l'attend, comme on peut attendre dans l'enfance, comme on le fait aussi, plus tard, dans l'amour. Elle sait que ce sera long mais elle attend. Quand arrive le soir, elle sait qu'il va venir. Alors elle guette le bruit de l'ascenseur, le pas familier dans le couloir, le cliquetis de la clé dans la serrure. (P.89)

Le père et la fille habitent des villes différentes, éloignées. Ils ont chacun une vie bien remplie. Se voient une fois l'an, peut-être. Quelquefois moins. On se téléphone. On parle de choses et d'autres, événements familiaux, professionnels, santé. D'un ton léger.
De rien. On e parle de rien.
On ne s'est jamais parlé.
On n'a jamais rien dit.
(...) Elle ne dit que des choses convenues. Il fait la même chose, sans doute. Jamais rien de vrai. Jamais rien de grave. Rien de ce qui pour elle est grave. D'ailleurs, elle n'appelle que lorsque tout va bien, lorsqu'elle peut donner d'elle une image positive. De lui, elle ne demande rien. Au fond, elle ne sait rien. Elle n'a jamais rien su. Elle ne saura jamais rien. Peut-être qu'elle ne veut rien savoir. Mais quelquefois, sous certains mots, sous une inflexion de la voix, d'un côté ou de l'autre, il y a quelque chose de plus, l'amorce d'une parole, comme une connivence. Cependant, rien n'est dit. Jamais. (P.145/146)

Conclusion

Un livre que je conseille vivement et que j'offrirai évidemment.

5 commentaires:

liliba a dit…

Heureuse que cela t'ai plu !

Cécile Qd9 a dit…

je confirme que ça m'a booooocoup plus (et moi aussi j'en suis heureuse)

sylire a dit…

J'ai lu les trois romans de Marie Sizun et je suis aussi enthousiaste pour chacun d'eux.
Par ailleurs Marie Sizun est une femme charmante, pétillante et passionnante à écouter. J'ai la chance de l'avoir rencontrée 3 fois.

liliba a dit…

Je n'ai pas lu le dernier sorti, mais j'avais adoré également La femme de l'Allemand, qui m'avait fait verser des torrents de larmes...

Lyvie a dit…

j'ai reçu ce livre voyageur aussi, et ce fut une belle surprise et une lecture très émouvante.