En direct de Conakry (le 03/12/09 vers 17h et un peu après)

Bonjour à celles et ceux qui écoutent les zinfos
Bonjour aux zotres

Certaines personnes m'ont écrit hier et ce matin parce qu'elles savaient que j'étais à Conakry et elles avaient entendu des infos sur la tentative d'assassinat du président guinéen. En fait, sur place, tout est très calme aujourd'hui et l'activité particulièrement normale.

Hier soir, vers 17h, depuis le bureau où nous travaillons, nous avons entendu quelques bruits lointains que j'ai identifiés comme 3 ou 4 claquements de "pétards" et quelques secondes plus tard une sorte de grondement de foule. Ca ne m'a pas vraiment fait dresser l'oreille, mes collègues guinéens étaient moins sereins.

Nous avons regardé par les fenêtres qui donnent une vue plongeante sur 2 des artères principales du centre ville et nous avons constaté que des gens se hâtaient de s'éloigner d'un certain point d'où venaient les bruits que nous avions entendu. Certains courraient, d'autres marchaient vite mais ce n'était pas une course effreinée et encore moins la panique. Mais on sentait que les gens étaient inquiets et prenaient leurs précautions.

Mes 3 collègues guinéens étaient inquiets aussi et dès lors, ils sont restés pendus au téléphone, appelant qui ils pouvaient à droite à gauche pour avoir des infos sur ce qui s'était passé. Dans la foulée on a entendu une autre salve de pétards et là, comme je ne suis pas totalement crétine, j'ai bien compris qu'en fait de pétards j'avais d'abord entendu quelques coups de feu et ensuite une ou deux salves de mitraillette. Mais pas plus.

Personne ne savait trop ce qui se passait. Moi, je me contentais de constater que les gendarmes et militaires qui surveillent constamment le bâtiment où je suis étaient très calmes, continuaient à papoter tranquillement dans la rue, à plaisanter avec les passants, etc. Ca m'allait très bien et leur attitude suffisait à m'indiquer que tout allait bien.

Au fur et à mesure que les coups de fil se multipliaient, les versions divergeaint quant à ce qui s'était réellement passé mais toutes mettaient en cause une caserne assez proche d'où nous sommes qui sert apparemment de Q.G. à la gendarmerie et en face de laquelle doit se trouver, si j'ai bien compris, un état major de je ne sais trop quoi, un truc officiel du gouvernement où se trouve un des bureaux du président.

Parmi les différentes versions entendues il y avait : tentative d'évasion de prisonniers, rixe entre gendarmes et militaires, rixe entre militaires de factions différentes, garde rapprochée du président tirant sur une voiture qui s'était arrêtée devant celle du président.

Nous sommes rentrés à l'hôtel par précaution vers 17h30 et les rues étaient parfaitement désertes, plus aucune voiture ne circulait dans le centre ville. C'est de très loin ça qui était le plus impressionnant et c'est le seul truc qui m'a momentanément inquiétée. Nos collègues guinéens qui vivent en banlieue sont restés sur place plutôt que de rentrer chez eux.

De coups de fil en connexion sur internet et en visionnage de chaînes infos sur la TV, la version de la tentative d'assassinat du président par un de ses proches prenait corps. C'est aussi ce que nous avons entendu à la radio ce matin sur RFI à 9h00 puis à 11h00. Apparemment le capitaine Moussa Dadis Camara serait légèrement blessé et le militaire qui lui a tiré dessus serait son aide de camp, largement mis en cause dans le massacre qui a eu lieu fin septembre dans un stade. Et c'est d'ailleurs à ce sujet que le président l'aurait convoqué dans le cadre des enquêtes en cours.

Donc bon, pas de souci sur le plan sécuritaire, rien que de très normal en fait, dans la mesure où j'imagine qu'une tentative d'assassinat d'un chef d'état dans n'importe quel pays du monde générerait les mêmes effets immédiats de confusion et d'inquiétude à proximité du lieu où elle se serait déroulée.

Pour conclure sur le sujet, voici un lien vers un article du Monde pas mal fait et assez complet. Il n'y a "que" deux erreurs : l'heure est 17h et pas 19h et les tirs n'étaient pas nourris...

A part ça ? Les membres de la commission d'enquête sur les événements de fin septembre diligentée par l'ONU logent au même hôtel que nous, le Novotel. Il faut dire que c'est le seul à peu près potable... Je dis bien à peu près car il y aurait vraiment beaucoup à dire sur cet endroit plutôt indigne du groupe Accor dans l'absolu et indigne d'un hôtel international y compris en tenant compte du lieu et de la situation actuelle du pays. A titre d'exemple, mes draps n'ont toujours pas été changés. Ca me serait complètement indifférent si j'avais été la seule à dormir dedans mais ils étaient sales à mon arrivée !!! En outre, certains membres du personnel (à mon grand regret, la vérité m'oblige de reconnaître qu'ils sont uniquement féminins) sont absolument désagréables et méprisants. C'est inadmissible.

Dernière chose pour le moment : il fait moins chaud que prévu, il y a moins de moustiques que je ne pensais mais ils sont beaucoup plus vicieux car ces salopiauds sont silencieux contrairement aux moustiques français dont le petit bourdonnement insupportable a tout de même l'avantage de signaler la présence : je pue donc la citronnelle 24h/24.