mardi 12 août 2008
La preuve par Quoide9 (Le Chameau Sauvage de Philippe Jaenada)
Bonjour Philippe
Bonjour les zotres
Pour démarrer cette rubrique dont j'ai eu l'idée en faisant une règle de 3 (bah, faut pas chercher), il me fallait un roman d'exception, que dis-je, une pièce d'anthologie. Sans trop de surprises c'est tombé sur "Le Chameau sauvage" de Philippe Jeanada (What else ? comme dirait Georges C. une tasse fumante à la main).
J'ai donc décidé de sortir le grand jeu pour OBLIGER (rien que ça) celles et ceux qui n'ont pas lu ce roman (prix de Flore 1997) à se précipiter chez leur libraire le plus proche pour l'acheter ou le commander ! (mais ça ne suffit pas, après il faut le lire, hein...). Vous pourrez donc lire ci-dessous :
- 9 preuves que j'aime vraiment vraiment vraiment ce livre,
- 9 preuves que je ne suis pas la seule à l'aimer,
- 9 extraits qui vous prouveront que vous aussi vous l'aimerez.
J'aime tellement ce livre que
01 - je l'ai offert un nombre incalculable de fois (enfin j'exagère, bien sûr, le nombre de fois où je l'ai offert est très calculable, disons qu'il est conséquent),
02 - j'en ai fait un enjeu systématique de pari (au cas où c'est moi qui perd mais, hélas pour les ventes de Jaenada, je paris rarement et pire, je ne perds presque jamais mes paris),
03 - je l'ai apporté à plusieurs dîners livres échanges (j'achète chaque exemplaire d'occasion (et potable) que je trouve),
04 - je truffe mon blog de parenthèses en référence à lui (je suis trop modeste et j'admire trop Jaenada pour écrire en hommage). Bon, j'adorais et j'abusais déjà des parenthèses avant mais, pour être honnête, j'avoue que j'en colle désormais un peu partout, tout le temps grâce à (à cause de ?) Jaenada,
05 - j'envisage de le faire lire à mes parents (bon, là c'est pas gagné),
06 - j'envisage encore plus sérieusement de le relire (à part le Petit Prince, la Mécanique des Femmes de Calaferte et quelques San Antonio, je n'ai aucun souvenir de relecture (intégrale) de livre),
07 - j'y pense (très) souvent et ça me donne la banane d'y penser et j'en parle dès que je peux,
08 - je crois que, si je n'ai pas d'auteur Chouchou au sens où [Caro]line l'entend, quelque part, ce livre est mon livre chouchou (à ne pas confondre avec "mon livre culte" qui est Septentrion de Louis Calaferte),
09 - Je ne crois pas qu'il existe des livres qui changent une vie mais je sais qu'il existe des livres qui nous changent. Tout comme Septentrion et La Place d'Annie Ernaux, ce livre a d'une certaine manière contribué à me construire ou, pour reprendre une bribe poétique de Calaferte, à me faire comprendre qu'il faut "oser se ressembler". Pour paraphraser Nietzsche citant Pindare (merci Google) (profitez en vous ne lirez pas du Nietzsche tous les jours ici, c'est moi qui vous le dit !), pour une raison ou une autre, ces 3 livres m'ont fait dire (penser) : "femme, deviens ce que tu es". J'ai encore des efforts à fournir mais mon cas n'est pas totalement désespéré (ni désespérant).
9 avis positifs qui me permettent de dire pourquoi je l'ai aimé
01 - Sur Santagore
Je n'aurais pas pu écrire quelque chose avec quoi je je sois plus d'accord. Leeloo évoque parfaitement le style désopilant de l'auteur, ses paranthèses que j'aime tellement que je les reprends dans chaque titre sur ce blog. Je suis assez diffi-Cécile en matière de lecture comique et je trouve que les auteur(e)s ayant vraiment de l'humour et capables de faire rire, vraiment rire bruyamment et irrépressiblement sont rares, très rares. Spontannément, seuls deux noms me viennent à l'esprit : Jaenada et Bill Bryson qui ont plus d'une fois dû me faire passer pour une folle dans le métro (m'en fout).
02 - Chez [Caro]line
Je suis fière de lui avoir fait découvrir Jaenada et heureuse qu'elle ait aimé. Quand je vous disais que j'en parlais tout le temps et que j'approvisionnais les participant(e)s aux dîners livres échanges !
03 - Laiezza sur chatsdebiblio
"Humain" et "Chaleureux" sont les deux adjectifs que je retiens de cette très belle critique de Laiezza. Il y a une vraie générosité dans ce livre qui transpire également de tous les messages qui en parlent. En outre, ce qu'elle dit à propos du Cosmonaute est très juste aussi.
04 - Lily sur Chatsdebiblio
Ce que Lily a écrit est sans doute le plus bel éloge que j'ai lu à ce jour. Je cite ces deux extraits : "avec lui on si on ne retrouve pas foi en l'existence on arrive à rire d'elle (c'est déjà pas mal)" et "Philippe Jaenada touche à l'universel en parlant d'un mec inspiré de lui-même, ce qui est soit du génie soit un coup de bol (en tout cas ça marche)". Quant au commentaire de Thom à propos de l'influence éventuelle qu'il aurait eu sur lui, je le rapproche évidemment de ce que j'ai écrit en 9e point.
05 - Ingannmic sur Chatsdebiblio
Attachant et émouvant. Au delà de la drôlerie évidente du livre, certains passages sont effectivement émouvants, tristes, mélancoliques... Le lien entre ces deux extrêmes et le côté foncièrement désabusé et l'autodérision constante du narrateur/personnage/auteur.
06 - Sur la Tête dans les Pages
La digression est élevée au rang d'art chez Jaenada (toujours ces fameuses paranthèses) . La comparaison avec la série des Wilt n'est pas fausse (mais je préfère de trèèèèès loin Jaenada à Sharpe).
07 - Sur vaste blogue
L'auteur parle du choc "Chameau Sauvage"... et prodigue un judicieux conseil : aller faire un tour sur le site de Jaenada.
08 - Sur Buzz littéraire
Je ne suis pas du tout convaincue que la maladresse masculine soit attachante comme on l'affirme ici mais j'avoue que l'anti-héros du Chameau Sauvage ébranle sérieusement mes propres convictions sur le sujet.
09 - Le Golb
Ici on insiste sur le fait que bien plus qu'un livre, le chameau sauvage est une rencontre. Extrait : On ne se contente pas, après une première lecture de Jaenada, d'en admirer l'inventivité ou la classe, d'en saluer l'écriture ou le génie du rythme. On s'attache, étrangement et viscéralement ; que celui qui après avoir lu son premier Jaenada ne s'est pas mis plus ou moins inconsciemment à imiter son style ou dérober ses parenthèses multiples me jette la première pierre.
Je crois que tout est dit...
Extraits
Certains de ces extraits proviennent du site de l'auteur. Le premier extrait est le début du roman. J'adore ! Si vous ne riez pas, vous êtes désespérant(e) (et/ou désespéré(e)).
01 - Un jour, ce n'est rien mais je le raconte tout de même, un jour d'hiver je me suis mis en tête de réparer le radiateur de ma salle de bains, un appareil à résistances fixé au-dessus de la porte. Il faisait froid et le radiateur ne fonctionnait plus (ces précisions peuvent paraître superflues : en effet, si le radiateur avait parfaitement fonctionné, un jour de grande chaleur, je ne me serais sans doute pas mis en tête de le réparer - je souligne simplement pour que l'on comprenne bien que ce premier dérapage vers le gouffre épouvantable n'était pas un effet de ma propre volonté, mais de celle, plus vague et pernicieuse, d'éléments extérieurs comme le climat parisien ou l'électroménager moderne : je ne suis pour rien dans le déclenchement de ce cauchemar). Dans le domaine de la réparation électrique, et d'ailleurs de la réparation en général, j'étais juste capable de remettre une prise débranchée dans les trous. Pas de prise à ce radiateur, évidemment. Mais je ne sais pas ce qui m'est passé sous le crâne ce jour-là, je me suis cru l'un de ces magiciens de la vie pour qui tout est facile (il faut dire que jamais encore je n'avais été confronté à de réels obstacles, ni dettes faramineuses, ni chagrins d'amour, ni maladies graves, ni problèmes d'honneur avec la pègre, ni pannes de radiateur, rien, peut-être un ongle cassé - alors naturellement, j'étais naïf).
02 - J’ouvre (la porte ne grince pas mais ça ne gâterait rien) et me retrouve face à la scène la plus abominable à laquelle puisse assister celui qui tient à sa cuisine comme à la prunelle de ses yeux (ce n’est pas on cas, mais je projette – c’est pour la question dramatique (si j’écris : « J’ouvre et me retrouve face à une scène un peu contrariante », c’est la déception) (et puis j’aimais bien ma cuisine, tout de même)).
03 - Je me sentais comme le dernier cornichon au fond du bocal, dédaigné, oublié là parmi les grains de moutarde et les sales petits oignons, le cornichon que personne ne va chercher dans la saumure.
04 - (...) à chaque fois que je me promenais dans mon quartier et que je voyais un camion de pompiers, un bastion de neurones pessimistes au fond de moi m’avertissait qu’il fonçait droit sur mon immeuble. Toujours j’avais dans un coin de l’esprit la certitude que les braves gars mettaient les gaz et brûlaient les feux rouges, sirène vagissante, pour aller tenter d’éteindre l’incendie qui ravageait mon appartement (une cigarette mal éteinte, le bébé du dessous qui a joué avec des allumettes, ma chatte qui a ouvert le gaz en essayant de grimper sur la cuisinière, un terroriste qui a déposé une bombe sur mon paillasson par erreur). Un jour le bastion de neurones alarmistes avait fait tant d’émules sous mon crâne que je m’étais mis à courir derrière le camion pour en avoir le coeur net - ah non ce n’était pas chez moi. Et les fois suivantes, je m’étais contenté de contrôler le pincement d’angoisse en serrant les mâchoires et en pensant à autre chose (à n’importe quoi, le championnat du monde de boxe, la tapîr de Colombie, les brochettes de lotte, les tableaux de Catherine, les jolies filles, l’hôtel d’Angleterre à Carteret).
05 - Je me sentais vide mais lourd, inutile, je n'avançais plus dans le temps. J'étais l'une de ces bouteilles de jus de fruits qui sont exposées dans les cafés, en hauteur, depuis le premier jour d'ouverture : décolorées, fadasses et translucides, avec toute la pulpe et la couleur déposées au fond en une mélasse dégoûtante. J'étais monté m'exposer là-haut tout seul, et plus personne n'aurait l'idée de me consommer.
06 - (...) un couple d'Allemands est venu me demander de les prendre en photo. Les couples d'amoureux me demandaient toujours de les prendre en photo. Les touristes et les autres : tous les amoureux qui se préparaient des moments de nostalgie me repéraient dans une foule. Je ne comprenais pas pourquoi ces gens semblaient tant tenir à souffrir plus tard (sans même parler d'éventuelle séparation (bien que des dizaines de couples que j'ai pris en photo doivent aujourd'hui être séparés, seuls éplorés ou radieux dans les bras d'un autre (qui sait si, dans ma vie, je n'ai pas photographié deux fois la même personne avec un amoureux différent ?)), car même ceux qui restent ensemble jusqu'à la mort souffriront forcément un peu, quinze ou trente ans après mon petit clic, en se voyant jeunes et beaux, heureux, en vacances, in Paris, in the springtime) ; je ne comprenais pas non plus pourquoi ils s'adressaient tous à moi (je ne pense pas avoir l'air particulièrement sympathique). Mais en fin de compte, j'étais plutôt flatté (...).
07 - En trois mots trois virgules, je venais de proposer à une fille que je connaissais pas de venir se déshabiller chez moi. Tu viens chez moi et tu te déshabilles. Qu'on me les montre, les tombeurs capables de ce genre de prouesse. Évidemment, je m'avançais un peu, car pour qu'il y ait prouesse il fallait d'abord qu'il y ait réponse de la partenaire (il doit y en avoir des tonnes, des séducteurs de pacotille qui proposent à des femmes de venir se déshabiller chez eux et qui essuient un échec). Tout à l'euphorie intime suscitée par ma phrase, je ne doutais plus de rien, je me voyais en crack. J'oubliais ce que j'avais appris ces dernières heures, la prudence et l'humilité, j'oubliais que rien ne se passe jamais comme prévu, que sous le masque enchanteur du triomphe peut se dissimuler le visage hideux de la débâcle et que la vie est un bordel monstre (...).
08 - Si la femme prend un déca, c’est qu’elle refuse le rapport. C’est un signal clair qui lui évite les remarques blessantes (“je ne tiens pas à coucher avec toi car ton physique me gène”) et les explications douteuses (“je t’offrirais volontiers mon corps mais j’ai mes truques” (une demi folle m’avait même annoncé, d’un ton grave et faussement navré, que si elle préférait rentrer chez elle, ce n’était pas que je ne lui plaisais pas, non, que je n’aille surtout pas croire ça, j’étais pas mal, mais malheureusement, elle avait une petite infection - ah zut, dommage)).
09 - On croise toujours deux fois les gens qui nous intéressent. La vie nous donne une deuxième chance, par gentillesse ou charité, ou parce que ça l’arrange.
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13 commentaires:
... Hum... Oserais-je l'avouer ? Jamais entendu parler de ce livre ni de son auteur avant de lire ces 27 preuves de "livre à ne pas râter".
Je vais donc bientôt aller à la ville voisine faire le tour de LA librairie, et leur demander s'ils ont ça en rayon... Sinon, hop, je le commande les yeux fermés, et tu verras un de ces jours un billet chez moi !
fais gaffe, a priori sur 3 livres "testés" (Foenkinos, Ben sadoun, Zeller) nous avons des avis opposés... ;o)
Cela dit, le but de cette "preuve par (quoide) 9 est bel et bien de diffuser d'autres avis que le mien. Très honnêtement je n'ai pas eu à trier pour ne prendre que les sons de cloche élogieux... Ils l'étaient tous. Le moins bon que j'ai lu était sur aufeminin.com (mais il était tout de même très positif).
J'espère que tu me (nous) diras vite ce que tu as pensé de ce livre. Que tu aimes ou pas, je suis en tout cas heureuse de te permettre de découvrir cet auteur.
Généralement, de lui, les gens adorent aussi "Le Cosmonaute". Disons que c'est celui qui vient souvent en 2e dans l'ordre des préférences mais si on retrouve la plume et l'humour de Jaenada, le sujet est beaucoup plus pesant et c'est pourquoi je ne conseille pas de commencer par celui la...
Rendons à Cécile ce qui appratient à Quoide9! Si j'ai lu ce roman, c'est en partie parce que tu en avais parlé il y a un moment sur ce blog. C'est resté dans un coin de ma mémoire. Merci à toi!
@ Gaël : je déduis de ce "merci" que tu as aimé... J'en suis évidemment ravie (et n'oublie pas d'offrir ce bouquin à tes ami(e)s. ;o)
P.S. : non, je ne touche aucun % sur les ventes de Jaenada...
Je n'ai rien de plus à dire sur ce livre exceptionnel.
Ah si : les Chatsdebiblio te remercient pour toutes ces copieuses citations :-)
Et aussi : interview de Philippe himself dans nos pages, samedi prochain.
Amitiés.
@ Thom : tu connais désormais une partie de mon emploi du temps de samedi et un des aspects que je développerai dans ma sélection de lectures bloggesques de la semaine à paraître dimanche...
Si ça t'amuse, il y a sur ce blog, dans les archives de septembre 2007, un questionnaire littéraire dont les réponses sont signées Jaenada.
Et si tu n'as rien à ajouter sur ce livre, n'hésite pas à commenter les zotres messages qu'ils soient livresques ou non et je compte sur ta participation au jeu des "livres à lire dans le métro" mis en ligne le 27-08-08.
J'ai découvert le titre et l'auteur aux dîners et sur quelques blogs (peut-être Caro[line]) mais finalement il ne me dit vraiment pas. Je suis venue voir ton billet parce que si tu es si convaincue, je me dis que je devrais me faire violence et peut-être adorer.
Bonjour,
J'ai découvert ce livre, il y a maintenant un peu plus de 4 ans. J'étais à l'époque en stage pour une petite société qui s'occupait de produire l'adaptation au cinéma de l'histoire. Le film s'appelle A+ Pollux (avec Cécile de France et Gad Elmaleh) et n'a malheureusement pas fait de nombreuses entrées lors de sa sortie en salles...
Aurore
j'ai raté le film lors de touesses diffusions TV maiiis je ne désespère pas de le voir un jour ou l'autre.
Je suis presque gênée de dire que j'ai pas aimé du tout ce livre.. Je crois que son style m'énerve (toutes ces parenthèses!)et le coup du chameau sauvage ne m'a pas parlé non plus :s
Enfin lu, grâce à toi, et beaucoup aimé ! Billet suit... un de ces jours ! (Mr Jaenada avait raison, je suis bien une chamelle sauvage...)
Woaaaaaw !!
Suis impressionnée !
J'ai bien fait de te rendre visite !
Joyeux Noël !
La preuve par 9 rend l'objet du délit très tentant... Les extraits sont savoureux, même si, je ne suis pas sûre de supporter un pareil rythme jusqu'au bout. Mais, mais mêêê... Je note en GROS: Penser à me transformer en chamelle un de ces jours & peut-être même prochainement...
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