lundi 11 août 2008

Les livres, la critique et moi (et inversement toutes choses égales par ailleurs)

Bonjour chez les filles
Bonjour les zéditions Denoël
Bonjour les zotres

Lorsque j'ai lu l'excellent
billet-coup-de-gueule (ben si, un peu quand même, hein...) que Magda a rédigé sur son blog à propos de la critique en général et de celle émanant des blogs littéraires en particulier, je me suis promis d'y faire écho. Enfin, pas tout à fait. J'avais envie de rédiger quelque chose sur la question depuis longtemps et Magda n'a fait que réactiver l'idée.

Le fait que de Chez Les Filles me propose de recevoir chez moi "La Veuve de Papier" de Florence Ben Sadoun paru chez Denoël pour en parler sur mon blog (bientôt !) est la goutte d'eau (fort agréable, merci) qui me pousse à l'acte. Alors voila...

Lorsque j'ai créé la liste de discussion Quoide9 chez yahoo groupes en mai 2000 (je vous parle d'un temps où les blogs n'existaient pas), j'étais pousée par diverses motivations :
- une inextingible envie d'écrire,
- une évidente soif de partage,
- un goût prononcé pour tout ce qui mérite + ou - le label culturel au sens large du terme : littérature, cinéma, musique, gastronomie, etc.,
- une curiosité bienveillante pour "les zotres" en général et "le goût des zotres" en particulier,
- une insatisfaction chronique voire grandissante à l'égard des critiques émanant de professionnel(le)s, journalistes et autres chroniqueurs/ses pay(e)s pour ça.

J'avais envie de découvrir les coups de gueule et surtout les coups de coeur de personnes lambda, de personnes comme moi, de consommateurs/trices (ce terme n'est pas péjoratif) libres de s'exprimer sans tenir compte d'un format d'écriture, de recettes publicitaires ou que sais-je encore et surtout, libres de s'exprimer en fonction de leurs goûts et découvertes du moment et non en fonction de l'actualité. Surtout sur le plan littéraire.

Je me suis d'ailleurs toujours méfiée de l'emballement médiatique autour d'un livre et l'une des règles auxquelles je déroge peu (mais parfois) est de ne (presque) jamais lire de livres qui viennent de sortir. J'écrivais récemment sur un blog, Second Flore je crois (pure formule de rhétorique, j'en suis évidemment certaine au moment où je l'indique), que les livres étaient comme la pâte à crèpe (ou le vin pour celles et ceux qui préfèrent les métaphores pinardières) : il est urgent d'attendre, de les laisser reposer (ou prendre un peu de bouteille) avant de les ouvrir, ils n'en sont alors que meilleurs et la dégustation n'est que plus satisfaisante.

Je ne lis (presque) que des livres de poche. Parce que c'est plus pratique dans le métro et moins lourd dans le sac, mais pas seulement :
- parce que l'emballement médiatique éventuel autour d'un livre a cessé depuis belle lurette lorsqu'il paraît en poche (questions : les livres ayant fait l'objet d'un battage publicitaire assomant lors de leur parution sortent-ils tous en poche ? de combien d'entre eux nous souvenons nous après 5 ans ? 10 ans ?),
- parce que, pour ma consommation personnelle, je les achète d'occasion et je les échange lors des dîners livres échanges qui existent maintenant depuis mars 2005.

Lorsque j'en ai eu l'idée mes motivation étaient peu ou prou les mêmes que pour Quoide9 : rencontrer, échanger, partager, découvrir, surprendre et être surpris(e), découvrir ou faire découvrir des oeuvres et des auteur(e)s que l'on aime, etc., en toute liberté, en toute convivialité.

Je suis convaincue que je n'aurais jamais jeté un oeil sur un roman de Barbara Pym dans une librairie, je n'avais jamais entendu parler de Catherine Cusset avant que quelqu'une apporte "Le problème avec Jane" (j'avais entendu parler du très dispensable "confession d'une radine" mais je n'avais pas retenu le nom de l'auteure à l'époque), je n'avais jamais lu d'Ormesson, Van Cauwelart, Claudel (Philippe, l'autre je l'ai lu - un peu - en prépa), Foenkinos, Zeller, Etxebarria, Lehanne, Rice et un tas d'autres avant qu'un dîner livres échanges ne m'en procure l'occasion. J'ai adoré certaines de mes lectures, d'autres moins, d'autres pas. A la limite peu importe. Ce qui compte est moins le fait d'aimer ou pas que de savoir pourquoi et, dans le cas de celles et ceux qui rédigent des critiques, de l'expliquer.

Et c'est exactement là que je veux en venir depuis le début (en doutiez-vous ?) : ce ne sont JAMAIS des critiques littéraires trouvées en kiosque qui m'ont donné envie de découvrir tel ou tel livre, tel ou tel auteur(e), ce sont des blogs (littéraires ou pas d'ailleurs), des recommandations de lecteurs/trices. C'est la passion communicative qui émanait d'un texte rédigé ou des paroles prononcées par quelqu'un(e) n'ayant aucun intérêt commercial à défendre l'oeuvre ou l'écrivain(e) qu'il/elle couvrait de louanges.

Je vais plus loin, comme je commence à (bien) cerner les goûts et références des bloggers/seuses que je lis, il peut m'arriver d'avoir envie de lire un livre ou de voir un film qui reçoivent des critiques négatives sachant que l'un(e) reproche à une oeuvre peut-être ce que l'autre recherche (écriture + ou - crue, soutenue, poétique, thème léger, sombre, girly, malsain, érotique, onirique, etc.). Il est évident par exemple que ce que
[Caro]line et moi avons respectivement écrit à propos de Zeller et Foenkinos (comment rêver avis plus diamétralement opposés pour illustrer mon propos ?) sera décrypté par chacun(e) en fonction de ses propres goûts et références : une critique négative de l'une ou l'autre n'est donc pas forcément un repoussoir pour les lecteurs/trices.

Les maisons d'édition ne s'y trompent d'ailleurs pas. A quelques jours d'intervalles deux d'entre elles m'ont envoyé des romans et j'ai déjà lu des critiques de l'un d'entre eux sur 2 autres blogs. Il est clair qu'elles cherchent l'avis (et plus encore l'approbation évidemment, personne n'est dupe) des bloggers/ses et surtout le bouche à oreille virtuel. A mon avis elles ont entièrement raison d'agir ainsi.

Attention, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit et encore moins pensé ou écrit. Je ne remets pas du tout en cause le rôle et l'utilité des critiques professionnel(le)s. Je dis juste qu'elles ne déclanchent jamais une envie d'achat (ou de lecture) chez moi (et je ne suis pas une exception). Les critiques des blogs, celles des forums et listes, si. J'adore les pages culturelles du Nouvel Obs et je les lis avec avidité et intérêt quand j'ai un Nouvel Obs sous la main (ce qui est rare, j'achète rarement la presse mais quand je l'achète, c'est le Nouvel Obs), idem pour tout autre magazine ou journal, payant ou pas à l'exception de Télérama (quand cesseront-ils de raconter les oeuvres dont ils parlent - surtout les films !!! - au lieu de les critiquer ?). Mais j'attribue à ces lectures un rôle informatif et elles m'apportent un vernis culturel : une biographie de Cendrars par ici, des anecdotes sur la sortie de Ratatouille par là, l'annonce du nouveau CD de Coldplay partout, des infos sur tel artiste que je ne connais pas et qui expose à Paris ou ailleurs. D'ailleurs, le plus souvent, lorsqu'un sujet lu dans un magazine m'intéresse particulièrement, mon premier réflexe est de chercher ce qu'on en dit sur le net en général et sur les blogs en particulier et c'est ça qui génère l'envie ou pas et emporte la décision au final.
L'énooooooooorme plus d'une critique rédigée par un(e) amateur/trice sur une liste de discussion ou un(e) blog tient selon moi à cette triple liberté :
- l'opportunité de revendiquer sa pleine subjectivité (argumentée et circonstanciée ça va de soi) en dehors des modes et des nécessités,
- la possibilité de contextualiser son avis en fonction de ses propres goûts, références, influences ou allergies du moment et/ou de toujours,
- la possibilité d'adopter un angle et un ton très personnels ce qui devrait théoriquement (mais on n'est à l'abri de rien) éviter la langue de bois et les compromis(sions).

Ca s'appelle exprimer (et défendre) un point de vue et lorsqu'on m'a demandé, parfois (rarement) : "mais de quel droit tu écris ça ?", c'est toujours ce que j'ai répondu : du droit que j'ai d'avoir un avis et de le donner en expliquant pourquoi tout en sachant que nul(le) n'est obligé(e) de le lire et encore moins de le suivre.


Mais quid de cette liberté chérie évoquée plus haut quand on reçoit un livre d'un éditeur, qu'on ne le choisit pas et que le cadeau apparaît déjà comme un début de commencement de tentation d'achat de bonne grâce ? Certes. C'est un risque. Aux bloggers/seuses bénéficiaires de ces petites attentions de ne pas succomber à la tentation de ne plus dire tout à fait ce qu'ils/elles pensent afin de rester dans les bonnes grâce de tel ou tel éditeur. Mais la complaisance se renifle vite et celles et ceux qui me connaissent savent qu'elle n'a jamais fait partie de mes vilains défauts (rassurez-vous, j'en ai pleeeiiin d'autres !).

Pour moi les règles du jeu sont claires. L'envoi d'un livre ou d'une invitation à un spectacle à un(e) blogger/euse "littéraire/culturel" apporte de la notoriété autour d'une oeuvre ou d'un événement auprès d'un public :
- restreint mais ciblé (on ne lit pas des critiques sur des blogs par hasard),
- privilégiant + ou - comme je le fais les conseils officieux aux critiques officielles.
A l'inverse, ma part du contrat consiste selon moi :
- à lire ce qu'on m'envoie
- parler du livre ici
- dire franchement ce que j'en pense
- parler du livre lors des dîners livres échanges et l'offrir à un(e) des participant(e)s en lui demandant de rédiger à son tour une critique circonstanciée ce qui accroît d'autant sa notoriété auprès d'un public de (gros(ses)) lecteurs/trices.

Ni + ni - (et inversement toutes choses égales par ailleurs).


3 commentaires:

In Cold Blog a dit…

Plutôt d'accord avec ta vision de la "chose", bien évidemment.
Il est vrai que lorsqu'on commence à bien cerner les goûts des blogueurs, il est plus facile de "décrypter" leurs critiques et de déceler sous un avis négatif un roman qui pourrait fortement nous intéresser.
Pour ce qui est des envois gracieux des maisons d'éditions (je constate que tu es en odeur de sainteté ;o)), si elles font leurs envois en fonction du ton et de l'esprit du blog (et non pas en fonction du trafic généré), elles doivent s'attendre parfois à d'éventuels "retours de bâton" (toujours dûment argumentés et circonstanciés ça va de soi), ça fait partie du jeu ;o)

Manon a dit…

Tout comme toi, je ne lis que très exceptionnellement les sorties littéraires. Et encore, il s'agit souvent de cadeaux. Le poche a mes faveurs, pour toutes les raisons que tu as citées plus haut.
Je n'ai pas encore trouvé le "critique officiel" qui m'ait donné monstrueusement envie de lire un livre. En revanche, les critiques de certains blogueurs ont généré cette envie chez moi. Je pense à Thom ou à Emma de Cafébook par exemple, qui augmentent ma liste de livres à lire très régulièrement.
Cela tient sans doute à l'attachement que l'on développe pour une plume, une familiarité, une sincérité qu'on ne peut vraiment trouver ailleurs que dans un blog!

Orchidee a dit…

je tombe sur ce pamphlet par hasard ... depuis in cold blog et montecore, à ton montecore puis là ...sur ce billet que je n'avais pas lu, je ne connaissais pas ton blog (ni les blogs tout court) à cette date... et j'apprécie ce que tu dis sur "de l'intérêt de commenter un livre" ... donc continuons !