mardi 18 septembre 2007
Louis Calaferte (1928-1994)
Bonjour les livrophiles
Bonjour les zotres
J'aime Louis Calaferte depuis longtemps et ce qui suit a été rédigé les 17 et 18 juillet 2000 sous la forme de 2 messages publiés sur la liste de discussion Quoide9. J'ai remis le tout en forme afin de n'en faire qu'un seul message, j'ai vaguement modifié ou complété une phrase ici ou là mais je ne retire rien de tout le bien que je pensais alors et que je pense encore à propos de l'auteur et de l'homme.
http://fr.groups.yahoo.com/group/Quoide9/message/68
http://fr.groups.yahoo.com/group/Quoide9/message/70
Louis Calaferte, appartient à la même famille d'auteurs que Céline et Miller. Le thème de SEPTENTRION est à rapprocher de celui de "Voyage au bout de la nuit" (en moins noir, Calaferte n'est pas désabusé, il est affamé, ambitieux, enragé) et de "Tropique du Cancer".
C'est une sorte de récit initiatique, de voyage en lui-même où Calaferte raconte quelques années de sa vie, des années d'errance et de galère où il commence à écrire. Il expose sa philosophie personnelle, le sens qu'il donne à l'existence, à son existence exempte de compromis et aussi (surtout ?) sa conception de l'écriture, de ce qu'est ou devrait être la littérature. Je trouve ce livre magnifique, magistral, d'une force et d'une poésie rares.
J'adore ses descriptions, son sens minutieux de l'observation, sa narration du moindre détail qui fait dire "oui, il a vécu ça, exactement ça et moi aussi j'ai vécu ça, un peu, un jour...".
Philippe Sollers a écrit "On n'a jamais, je dis bien jamais, écrit quelque chose d'aussi fort, d'aussi cru et violent. Et drôle. Et horrible. Et peut-être prophétique (...) Ne pas avoir lu ou ne pas lire sur-le-champ Septentrion est forcément immoral."
Je vous livre la première phrase suivie de 436 pages : "Au commencement était le Sexe". Tout est dit… Certains passages sont très crus, d'autres assez violents (pas de sang mais des idées) et, à ce titre, le livre a été censuré lors de sa parution. L'édition de poche chez Folio précise que cette fresque autobiographique rédigée en 4 ans vers le milieu des années 50 "a été condamnée à ne paraître qu'en édition dite "hors commerce" et ce n'est que 20 ans plus tard que ce livre culte sera ENFIN republié chez Denoel."
Louis Calafarte a écrit « Il est des livres qu'on aime avoir auprès de soi ainsi que des bréviaires. La force de leur contenu est telle que rien ne s'en affaiblit avec le temps. Nous sommes en leur compagnie au plus ardent du creuset de l'esprit et les hommes qui les ont écrits devraient être vénérés à l'égal des saints."
Je n'irais pas jusqu'à vénérer Calaferte mais SEPTENTRION est INCONTESTABLEMENT le livre qui m'a le plus marquée, celui qui a eu le plus d'impact sur moi, le seul qui, peut-être, m'a changée. J'adore l'écriture directe et exigeante de l'auteur, son refus des concessions et des phrases édulcorées, son engagement entier dans ses mots, son authenticité. André Gide a dit "les bons sentiments font la mauvaise littérature"... Pas une once de bon sentiment chez CALAFERTE, juste des mots vrais au service d'une plume rare.
Le premier livre de lui que j'ai lu est LA MECANIQUE DES FEMMES, bribes et aphorismes, souvenirs et expériences vécues auprès de femmes différentes, des prostituées, des jeunes filles… Un recueil d'impressions souvent très crues mais jamais gratuites ni vulgaires.
C'est court, c'est sexe, très sexe, c'est poétique, c'est violent, c'est tendre, c'est sensuel, c'est cru, c'est tout ce que j'aime. En lisant ça je suis passée par toutes les émotions, du rire au larme et par un tas d'autres sentiments et sensations.
J'ai aussi adoré C'EST LA GUERRE où l'auteur évoque sa vie à Lyon entre ses 11 et 15 ans. Au départ, le style est enfantin, factuel, très descriptif puis au fil des pages et des mois écoulés, le petit garçon grandit, comprend et analyse.
L'écriture évolue, se complexifie et le jugement naît sous la plume de l'auteur. Un vrai témoignage sur les années de guerre et d'occupation, les salauds de la milice et le marché noir, les résistants de la dernière heure et la majorité silencieuse.
Je précise pour finir que Louis Calaferte fut aussi auteur de théâtre, peintre, poète et que ces aphorismes sont magnifiques. En voici quelques uns qu'on peut notamment lire dans "CHOSES DITES" (entretien pour France Culture enregistré en 1998 suivi d'extraits de textes, d'aphorismes).
Je sais des choses intransmissibles autrement que par le silence.
Rien ne nous blesse autant que nos ambitions avortées.
Elles lassent leur sensualité dans des frissons de robes.
Ma faiblesse réside dans le fait que je suis comme un animal blessé et que j'ai besoin d'amour.
Progresser c'est être en permanence l'inexpérimenté.
Dieu n'est peut-être que l'extrémité de soi.
Mort, j'aimerais qu'un jour, en souvenir de moi, quelqu'un offrît une rose rouge à l'être de son choix.
Et je l'ai fait ! Un jour, j'ai offert une rose rouge à quelqu'un en souvenir de Louis Calaferte.
@ +
Cécile
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6 commentaires:
j'ai des envies de lire et d'ecrire à vous lire ce soir.
Eh bien c'est fait pour ça... Tu connais déjà Calaferte ?
j'ai lu tout Amelie en 6 mois ... il me manque d'acheter son dernir roman. apres ok
Lire toute l'oeuvre d'un auteur d'un coup, voilà qui ne me viendrait pas à l'idée... Je trouve que pour apprécier un(e) auteur(e) mieux vaut le consommer avec modération pour le savourer lentement plutôt que de se goinfrer au risque de ne plus apprécier. En littérature comme dans mon assiette je n'aime pas la routine et encore moins l'excès, j'aime la diversité, la surprise, l'émotion renouvelée.
Vas-tu dîner tous les soirs au même restaurant si tu aimes leur cuisine ? ;o)
Je venais me renseigner sur ce Calaferte (à vrai dire je n'étais même pas sûre qu'il existait vraiment, même après lecture de ton commentaire chez moi), mais là je suis conquise. Je note immédiatement "Septentrion". Il faut aussi que je lise "Voyage au bout de la nuit" cette année...
Je relis pour la 3éme fois, Septentrion, à de longs intervalles (mon âge 61 ans). Et de suite je cherche des commentaires sur cette œuvre si jubilatoire ! Sur ce blog (ressemble au blog des livres, coïncidence ?)j'ai trouvé des amoureux de son style si pointu, Calaferte est au niveau de Céline, ce langage cru et si vrai. Où les mots sont des images travaillées au scalpel...
Bref, relire Céline et Calaferte me donneront encore de bons moments de lectures. Gérard
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