mardi 24 avril 2012

Quadrille (de Sacha Guitry)

Bonjour aux amants
Bonjour aux maîtresses
Bonjour aux cocu(e)s
Bonjour aux fidèles (si ça existe ?)
Bonjour aux zotres

Lors de leurs (rares) visites à Paris mes parents apprécient d'aller au théâtre et la délicate mission de choisir la pièce ad hoc m'incombe. Il faut notamment que la pièce soit drôle sans être trop boulevardière, que le casting comprenne des acteurs connus, que la mise en scène ne soit pas trop décalée, etc.

Très peu de pièces à l'affiche correspondaient à la recherche. Je dirais même plus, seule Quadrille de Sacha Guitry (et dans une moindre mesure Pensées secrètes que j'avais déjà vu) répondait au cahier des charges.

Le sujet

Philippe est sur le point de demander la main de sa maîtresse, Paulette, une actrice de théâtre célèbre mais celle-ci succombe au charme de Carl, une vedette italo-américaine de passage à Paris qui provoque une grave crise au sein du couple. chacun de leur côté (et avec des motivations bien différentes), Philippe et Paulette se confient à Claudine, une amie journaliste.

Mon avis

Sacha Guitry est une valeur sûre des soirées théâtrales en famille. Ainsi étais-je allée voir il y a quelques années (vers 2006), avec mes parents aussi, le très bon Nouveau testament avec Jean-Pierre Marielle et Françoise Fabian, déjà fort classiquement mis en scène par Bernard Murat. Forcément, les comparaisons s'imposent et la première qui me vient à l'esprit est que le texte de Quadrille est moins spirtituel et percutant et que l'intrigue est plus ténue. La fin est un peu expédiée à la façon d'une pièce de Molière.

Il n'en reste pas moins que si le cocufiage est au coeur du débat, on n'est pas trompé(e) sur la marchandise et que l'on voit exactement ce que l'on est venu chercher : du rire, de l'acidité, des réflexions misogynes, des considérations sur la fatalité et les malheurs de l'adultère, les plus grands étant, selon Guitry, premièrement qu'un autre soit informé de son infortune avant soi, deuxièmement qu'un autre sache de quoi l'on se contente !

La mise en scène est on ne peut plus classique, les costumes changeants et les décors plutôt beaux et bourgeois offrent un bel écrin au casting de rêve réuni pour la pièce.

François Berléand est grandiose jusque dans la précision de gestuelle et l'expressivité de ses silences.
Florence Pernel pétille. Elle campe un personnage libre et, à bien y réfléchir, plutôt progressiste voire féministe.
Pascale Arbillot est parfaite en femme torturée par la passion, écartelée entre ses sens et sa raison, empêtrée entre les principes de la morale bourgeoise et ses désirs de femme. C'est elle le véritable ressort comique de la pièce.

Enfin, last but not least, on ne pouvait rêver meilleur choix que celui du sublissime François Vincentilli pour le rôle de Carl tant il incarne un séducteur malgré lui plus vrai que nature, tout en finesse. Son léger accent italien volontairement surjoué lui permet de conserver une distance vis à vis du personnage et, subtil et paradoxal équilibre, lui confère un je-ne-sais quoi de ridicule tout en lui donnant, si c'est possible, encore plus de charme.

A chacun de ses (nombreux) sourires, je m'enfonçais de quelques centimètres dans mon siège en songeant que si les deux actrices auraient pu intervertir leurs rôles, ça n'aurait pas été possible pour les acteurs ! et que j'aurais bien aimé être à la place de Pascale Arbillot, notamment lors d'une scène d'anthologie où celle-ci à bien du mal à garder ses esprits lors d'une délicate discussion téléphonique... C'est indiscutablement le moment clef de la pièce et pas simplement pour le texte !

On est finalement assez loin des stéréotypes misogynes que l'on prête à Guitry et si le personnage de Philippe se plaind des femmes, c'est qu'il est victime de leur liberté d'action et de parole plutôt que de leurs prétendus défauts. Paulette et Claudine sont juste en avance sur leur temps et leurs comportements respectifs ne donneraient pas matière à une pièce de nos jours. Paradoxalement, c'est peut-être la modernité de ses héroïnes qui permet de relativiser celle que l'on prête à mon avis un peu abusivement à Sacha Guitry.

Quelques citations

Il ne faut jamais aller au devant des choses qu'on redoute.
Quand on a vingt ans de plus qu'une femme, c'est elle qui vous épouse.
Quels ravages un être peut causer par la seule force de sa séduction.
Une femme ne quitte en général un homme que pour un autre homme tandis qu'un homme peut très bien quitter une femme à cause d'elle.

Informations pratiques

Quadrille de Sacha Guitry
Mise en scène de Bernard Murat avec François Berléand, Florence Pernel, Pascale Arbillot et François Vincentelli.
Théâtre Edouard VII. 10, Place Edouard VII
75009 Paris - Métro Opéra
Du mardi au samedi à 21h
Le samedi à 17h30 et le dimanche à 15H30

Quelques liens
Culturebox
Au féminin.com
Very beautiful Indeed
Fous de théâtre

Conclusion
Du Guitry pur jus servi par un casting excellent !

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