mardi 29 janvier 2008

B comme Beigbeder (et comme bien mais bref et basique)

Bonjour Frédéric
Bonjour (et bravo) à la personne chargée de retoucher la photo
Bonjour aux zotres
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Je poursuis la récitation bimensuelle de l'alphabet littéraire que j'ai exploré tout au long de l'année 2007 avec la lettre B comme Beigbeder.
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Si le compte-rendu de mon challenge ABC avait bien mal commencé avec A comme Angot, vous allez voir que les choses s'arrangent nettement même si, des 3 Beigbeder que j'ai lu pour le moment, je classerait celui-ci médaille de bronze.
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J'ai longtemps refusé d'ouvrir un livre de Beigbeder car je détestais le battage médiatique autour de lui. L'âge aidant (le sien, pas le mien même si nous avons sensiblement le même), le personnage s'est assagi et a gagné en profondeur (j'imagine) et j'ai aimé les interviews de lui lues et entendues lors de la sortie de "L'égoïste Romantique".
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Une amie me l'a prêté et j'ai adoré. J'ai eu envie d'en lire d'autres afin de vérifier que mon coup de coeur n'était pas dû uniquement au sujet et surtout à la forme du livre. J'ai enchaîné avec "L'amour dure 3 ans" que j'ai beaucoup aimé aussi.
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Le recueil des "Nouvelles sous extasy" est bien également mais il ne saurait rivaliser avec les deux romans évoqués plus haut.



Présentation

Ce très mince recueil d'à peine 100 pages réunit 14 courtes nouvelles (pour vous en convaincre, divisez 100 par 14) publiées dans différentes revues comme Globe, Max ou Technikart entre 1990 et 1999. Leur qualité est par définition inégale mais dans l'ensemble, j'ai bien aimé et c'était parfait à lire entre deux séances de cinéma pendant le Festival Télérama 2007.


Le livre commence par un avertissement de quelques lignes qui se termine ainsi :
"non seulement l'ecstasy est illégal, mais en plus il abîme le cerveau, comme le prouve ce recueil de textes écrits sous son influence. Et puis, avons nous besoin d'une pilule pour raconter notre vie à des inconnus ? Alors qu'il y a la littérature pour ça ?"

J'ajoute qu'il y a également les blogs, MSN, Facebook, etc.



Les nouvelles

Spleen à l'aéroport de Roussy-Charles-de-Gaulle
L'originalité et le principal intérêt de cette nouvelle est d'être rédigé exclusivement sous forme de questions. Cela confère au texte une sorte d'urgence et de mélancolie. Jolie réussite pour un exercice de style de 6 pages qui lasserait évidemment si elles étaient 200. Pas mal.

Un texte démodé
"Une soirée, comme une vie, n'est réussie que si elle a mal commencé."
"Peut-on penser comme Baudelaire avec les mots de Bukowsky ?"
"Le plaisir présente un avantage : contrairement au bonheur, il a le mérite d'exister."
"Aimer ou faire semblant d'aimer, où est la différence, du moment que l'on parvient à se tromper soi-même ?"

Beigbeder a le sens de la formule (de la part d'un ancien publicitaire c'est un minimum) et c'est une des choses que j'aime chez lui.


Le jour où j'ai plu aux filles
J'ai trouvé amusant le récit de cette journée "pas comme les autres" où le narrateur s'étonne de sa soudaine et incompréhensible bonne fortune dont il n'oublie pas de profiter allègrement. Une bonne idée. Un an après ma lecture, c'est une des rares nouvelles dont je garde un souvenir très précis.

La première gorgée d'ecstasy
Cette nouvelle finalement très morale et non dénuée d'humour tient à la fois de la description quasi clinique et de la réflexion philosophico-sociologique. On peut y lire :
"Avant de l'avaler avec une gorgée de coca, j'ai hésité un dernier instant : impossible de savoir ce qu'il y a là-dedans. Il faut faire confiance à des types qui ont trafiqué cette pilule dans des laboratoires clandestins, au fond d'une cave mal éclairée. Si ça se trouve, ils ont tripoté ce truc avec des mains dégueulasses."

et cette dernière phrase me fait rire à chaque fois qu'elle me tombe sous les yeux (note pour plus tard : penser à elle pour mes citations du moment) :
"Je compose des airs de house incroyables dans ma tête. Je suis Wolfganf Amade-House !"

Manuscrit trouvé à Saint-Germain-Des-Prés
Une de mes amies reproche à Beigbeder d'être cynique. Elle a écrit : "Je ne sais plus dans quel roman il évoque l'édification d'un mur dans Paris qui séparerait/protégerait les plus riches des autres". Elle parle de cette nouvelle. Inutile de dire que j'ai eu une lecture complètement différente de ce texte, rédigé sous forme de témoignage "posthume". Je le trouve assez drôle et particulièrement réussi mais aussi très moral puisque... mais non, lisez-le vous-même et faites-vous votre propre opinion. Curieusement (ou pas tant que ça ?), ça m'a fait penser à une nouvelle de Dino Buzatti publiée dans "Le K" où un "bourgeois" quadra est poursuivi par de jeunes révolutionnaires fanatiques.

Le cafard après la fête
Sans grand intérêt

L'homme qui regardait les femmes, 1
"L'hymne des plages, selon moi, n'est pas Sea, Sex and Sun de Serge Gainsbourg mais plutôt J'aime regarder les filles de Patrick Coutin."
Une nouvelle qui commence par une référence à cette chanson culte ne saurait être mauvaise. ;o)

Comment devenir quelqu'un
Un nouvelle sur le fameux quart d'heure (ou plus) de célébrité et plus si possible, sur le pourquoi et le comment de celui-ci. Là encore j'ai immédiatement songé à une nouvelle du "K" de Buzatti intitulée "pauvre petit garçon". Je n'en dis pas plus.

Le plus grand écrivain français vivant
"Aujourd'hui encore, je me demande comment il faisait pour concilier ces deux activités : écrire et vivre." Voilà une question pour Jorge Semprun (lire le génialissime "l'écriture ou la vie" disons même prioritairement à l'oeuvre de Beigbeder ;o) ) pour le reste, cette nouvelle est dispensable et on se demande surtout si le personnage décrit par l'auteur s'inspire d'un véritable écrivain ou non... et si oui, qui ? mais qui bon sang !

La nouvelle la plus dégueulasse de ce recueil
Je ne suis pas certaine qu'elle mérite son titre, en tout cas c'est une des plus réussies selon moi et elle fait réfléchir des questions telles que : qu'est-on prêt à faire par amour ? L'amour a-t-il besoin de preuves ? Aime-t-on vraiment quand on en demande ? Peut-on ne pas faire souffrir la personne qu'on aime et ne pas souffrir soi-même par amour ? Etc. Bref, un texte intéressant et paradoxal offrant de bons thèmes pour un bac philo.

L'homme qui regardait les femmes, 2
"je n'ai pas le sida mental : nous avons une capote mentale : notre façon de nous protéger c'est de tout VOIR sans jamais rien FAIRE : ma bite ce sont mes yeux : si vous saviez le nombre de top-models que j'ai baisés avec mes yeux : je suis un obsédé visuel"

Extasy à go-go
Le récit d'une nuit chaude et délétère à Patong, un coin glauque de l'île de Phuket, dont chacun sait depuis un certain tsunami que c'est en Thaïlande.

La première nouvelle d' "Easy Reading"
Pas la meilleure. Euphémisme.

La solitude à plusieurs
Cette nouvelle plutôt réussie et bien écrite reprend les thèmes chers à Beigbeder à propos du couple et développés dans "l'amour dure 3 ans". Il écrit notamment : "
Il existe une zone de flou artistique entre le célibat dépressif et le mariage ennuyeux : baptisons-la bonheur. Le couple sert à protéger les lâches contre la vérité de ce monde (...). Mais l'amour est un mensonge qui a de bons côtés, me dis-je en mordillant l'oreille de Delphine sous la lune suspendue à 384.400 kilomètres au dessus de nos innocentes petites têtes."



Conclusion

Même si l'humour et le sens de la formule sont moins présents que dans ces romans, ce petit recueil intéressant est idéal à glisser dans une poche et à ouvrir entre deux portes, dans le métro ou ailleurs si affinités. Mais pour un voyage en train, même un Paris-Le Mans en TGV (55 minutes) ça sera beaucoup trop léger.

@ +

Cécile

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Sur L'Egoïste Romantique : message du 02/08/06 dans les archives de la liste de discussion Quoide9
Sur L'amour dure 3 ans : messages du 18, 20 et 21décembre 2006
Ma liste à moi que j'aimeuh beaucoup
http://fr.groups.yahoo.com/group/Quoide9
(critiques ciné, théâtre, livres, musique, expos, restos...)

6 commentaires:

Jerry OX a dit…

j'ai lu "l'amour dure 3 ans" et puis un autre de ses romans il y a quelques temps . Le personnage est un peu ambigue mais son écriture est au dessus du lot , bien au dessus de certains "soi disant" grands romanciers actuels !!

Antoine a dit…

Beigbeder est capable du pire comme du meilleur... Pour moi, l'amour dure 3 ans et 99F font partis des meilleurs et en revanche, l'egoiste romantique ou windows on the world font parti des ratés... Et j'aime bien ces premiers livres, Nouvelles sous Ecstasy, Vacances dans la peau et Mémoire d'un jeune homme dérangé ! Je les ai tous et je les ai tous lu... Et dans l'ensemble j'aime bien... Il fut un temps où mon ambition dans la vie c'était devenir Beigbeder... Il y a pire tu me diras...

Cécile Qd9 a dit…

@ Jean Philippe : je ne dirais pas ambigu mais désabusé et amateur de paradoxes et de jolies formules. Je ne dirais pas non plus que son écriture est au dessus du lot... Dans les développements, les paragraphes un peu longs, F.B. n'est pas pas transcendants. En revanche, certaines de ses formules font mouche. Dans la vivacité du trait, dans la saillie mordante, il excelle et c'est ça que j'aime dans ses livres.

@ Antoine : Il y a pire ambition en effet. Et quelle est-elle maintenant ?

David in Setouchi a dit…

Si je ne m'abuse, "le Plus Grand Ecrivain Français Vivant" est Antoine Blondin, la nouvelle étant "inspirée de faits réels".

Nicole C a dit…
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
Cécile Qd9 a dit…

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